Réseaux et stockages : quels enjeux pour les énergies renouvelables ?

Par Anaïs Hollard , le 17 octobre 2023 - 7 minutes de lecture
Champs d'éoliennes

©CFOTO/Sipa USA/SIP

Du fait de leurs nombreux avantages, les énergies renouvelables représentent une part de plus en plus importante de nos consommations. Seulement, leur caractère intermittent pose un problème majeur : celui du stockage de ces ressources. En effet, comment assurer l’équilibre entre la production et la consommation d’énergie renouvelable sur le réseau français ?

Réseaux et stockages : quelques fondamentaux

En 2022, les énergies renouvelables, ou EnR, ont représenté pas moins de 20,7 % de la consommation finale brute d’énergie en France1. une part qui devrait atteindre les 33 % en 2030, pour respecter les objectifs de la loi énergie climat. Pour atteindre cet objectif ambitieux, un enjeu fondamental subsiste : il s’agit de la gestion du stockage de l’énergie. En effet, les EnR présentent la particularité d’être des énergies intermittentes. L’énergie solaire par exemple dépend… Du taux d’ensoleillement à l’instant T. L’énergie éolienne varie quant à elle en fonction de la force du vent. Aussi, ces sources d’énergie offrent une production variable en fonction des différentes périodes de l’année, et même de la journée, ce qui pose le problème de la stabilité du réseau.

Pour garantir l’équilibre entre la production et la consommation de l’énergie et assurer à tous un accès continu à cette ressource, il convient donc de stocker une partie de cette énergie pour une utilisation ultérieure, afin de réduire les pertes et d’optimiser les coûts. Le stockage de l’énergie est donc au cœur de nombreux enjeux environnementaux, économiques et stratégiques.

🇬🇧 L’Angleterre en panne de jus !
Le parc éolien britannique équivaut en moyenne à la puissance de 14 centrales nucléaires. Grâce à cette énorme puissance, la part de l’éolien dans le mix énergétique britannique peut atteindre jusqu’à 50 %. Or, en août 2019, pas une brise n’est venue faire battre les pâles des nombreuses éoliennes du pays, dont une partie a de fait été plongée dans le noir l’espace de quelques heures. Voilà qui illustre l’absolue nécessité de renforcer les systèmes de stockage d’énergie, pour assurer la flexibilité des réseaux, en tout temps.

Comment stocker l’énergie sur le réseau ?

Les sources d’énergies fossiles (charbon, gaz naturel, pétrole), sont présentes naturellement sous forme de réservoirs et donc, déjà stockées. Après extraction, elles peuvent aisément être hébergées et transportées grâce aux solutions techniques déjà existantes. Il n’en est toutefois pas de même pour les énergies renouvelables intermittentes dont la production est nécessairement relayée via des vecteurs énergétiques tels que la chaleur ou l’électricité, qui nécessitent des dispositifs de stockage spécifiques.

L’électricité demeure une ressource difficile à stocker sous sa forme propre. C’est pourquoi elle est généralement transformée, afin d’être stockée sous une autre forme : mécanique, thermique ou chimique par exemple. L’énergie thermique, quant à elle, est essentiellement stockée sous sa forme originale, c’est-à-dire sous forme de chaleur.

Si la France, comme ses homologues, doit nécessairement investir des milliards d’euros pour augmenter la performance de ses services de stockage et maintenir à terme le même niveau de sécurité d’approvisionnement qu’aujourd’hui, il existe d’ores et déjà de nombreux systèmes qui permettent de préserver l’énergie produite par les EnR. En matière d’électricité on utilise notamment :

⚡ Le stockage thermodynamique avec les systèmes de stockage par air comprimé (CAES) ;
⚡ Le stockage gravitaire de masse d’eau avec les Stations de transfert d’énergie par pompage (STEP) ;
⚡Le stockage électrochimique avec les batteries (au plomb, sodium-soufre, lithium-ion…) et super condensateurs ;
⚡ Le stockage d’énergie cinétique avec les volants d’inertie.

Du côté de l’énergie thermique on peut mobiliser :

🔥 Le stockage de chaleur sensible avec l’eau chaude ou les sels fondus ;
🔥 Le stockage de chaleur latente avec la glace ou les matériaux à changement de phase ;
🔥 Le stockage  thermochimique avec des réactions chimiques ou la production d’hydrogène ;
🔥 Le stockage de froid.

À ce jour, les STEP représentent plus de 90 % des méthodes de stockage dans le monde. À ce sujet, la France détient un atout de taille, grâce à son parc hydroélectrique qui compte parmi les plus importants d’Europe. Selon RTE, en 2020, le parc de stockage hexagonal atteignait ainsi une puissance de 4 850 MW dont 4 810 MW de type hydraulique, y compris marin, et 40 MW de batterie2. Un chiffre encore largement insuffisant si l’on tient compte des ambitions en matière de renouvelables sur le réseau à l’horizon 2050.

Quelles innovations en matière de stockage d’énergie ?

Compte tenu de l’importance du déploiement massif de dispositifs de stockage pour les années à venir, les chercheurs du monde entier s’attellent à développer de nouveaux systèmes afin de garantir l’équilibre de réseaux. Voici une sélection de quelques innovations en la matière : 

💧 Un système de stockage d’énergie à base d’eau et de sel : C’est la promesse de « l’Aquabattery », une technologie de stockage, dont le fonctionnement est assuré par l’énergie chimique générée, lorsque l’énergie électrique traverse un mélange d’eau salée et un réseau de membranes d’électrodes. 

La batterie au sable : Cette invention déployée par une équipe d’ingénieurs finlandais n’est pas destinée à stocker l’électricité, mais la chaleur. En effet, ce dispositif qui prend la forme d’un silo rempli de sable de construction recueille le surplus de production d’électricité d’origine solaire ou éolienne, de façon à le convertir en chaleur, qui peut ensuite être libérée au moment propice.

🧱 Un supercondensateur à base de ciment, d’eau et de carbone : Une équipe de chercheurs du MIT a mis au point un mélange de ciment, d’eau et de noir de carbone sous forme nanométrique à même, selon eux, de contribuer à stocker directement de l’électricité dans la structure des bâtiments.

Si les idées sont nombreuses, les investissements demandent encore à être maximisés afin d’accroître le développement et les capacités de stockage des énergies renouvelables et de garantir la distribution d’énergie pour tous. Selon les données de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena), en 2022, les investissements mondiaux en faveur de la transition énergétique, qui incluent les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, l’électrification des transports et de la chaleur, le stockage d’énergie, l’hydrogène et le captage et le stockage de CO2, se sont élevés à 1 308 milliards de dollars. L’organisme appelle toutefois les Gouvernements à quadrupler ces moyens dans les années à venir !

1Source : Ministère de la Transition Énergétique – Les énergies renouvelables en France en 2022
2Source : RTE – Bilan électrique 2020

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Anaïs Hollard

Captivée par les sujets liés à l’énergie, Anaïs a longtemps collaboré avec de grands acteurs du secteur, avant de choisir la voie de l’indépendance, en tant que journaliste web. Aujourd’hui, elle continue de délivrer son expertise en matière d’énergie et de transition écologique. Ses passions : la lecture, l’écriture (forcément) et les DIY créatifs !

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