Cléa, lead product designer : « Il faut des entreprises précurseuses pour avancer dans le bon sens »
Cléa Da Costa est arrivée à Ekwateur en 2022. Un an et demi plus tard, la Nancéienne dirige une équipe de plusieurs products designers. Pendant longtemps, elle a multiplié les missions en tant qu’indépendante et en agences avant d’intégrer une société engagée qui correspond à ses valeurs. Dans son travail, l’ancienne maquettiste au sein de Glamour explore la notion de design éthique et le rôle des entreprises dans la transition écologique.
Qu’est-ce qu’un product designer ?
C’est une personne garante de l’expérience utilisateur (UX) ainsi que du design de l’interface d’un produit ou d’un service digital. Concrètement, elle se charge d’améliorer les fonctionnalités ainsi que la navigation, elle fait en sorte que la visite sur la plateforme soit agréable, fluide et pertinente pour les visiteurs, que ça réponde en somme à leurs besoins.
Ensuite, elle est sur l’UI ou « user interface », c’est-à-dire la partie graphique et visuelle d’un site web ou d’une application mobile. Les questions à se poser : le site est-il accessible pour une personne daltonienne, par exemple ? Est ce que le texte est clair ?
Sans oublier la partie research. En clair, il s’agit de comprendre les attentes et les usages des uns et des autres. Le product designer mène des études, échange avec d’autres au sein de l’entreprise. Notamment les développeurs et la data, consultés au sujet des contraintes techniques…
Concrètement, c’est quoi un designer éthique ?
Un designer éthique pour moi, c’est un designer qui va prendre en compte l’impact sociétal et environnemental du produit qu’il imagine, qui va penser à l’accessibilité, la fin de vie, l’usage dans sa globalité…
Les entreprises réduisent leur impact écologique de plus en plus. Est-ce une évolution logique, selon vous ?
Oui, dans la mesure où par exemple j’ai souhaité travailler pour une entreprise qui a du sens pour moi. L’éco-conception est une donnée très importante. Il est capital de mesurer l’empreinte écologique des produits et des services. De plus en plus de sociétés y viennent. Cela avance, tant mieux.
Pour moi, les acteurs économiques peuvent prendre les devants et ne pas forcément attendre le changement d’une réglementation afin de limiter leur empreinte et d’avoir un impact plus positif sur la planète. C’est bien qu’il y ait des organisations précurseuses sur le sujet. D’autant que ce n’est pas évident, en particulier dans le domaine du design. Par exemple, il est plus facile de lancer un site 100 % écoconçu plutôt que de tenter de réduire l’impact d’une plateforme existante.
Ce n’est pas facile, alors comment fait-on pour avancer dans le bon sens ?
C’est une réflexion permanente, on doit y penser sans arrêt pour ne cesser d’améliorer les produits. Par exemple, actuellement, Ekwateur participe aux Apidays, un challenge auquel participent une dizaine d’entreprises. L’idée : que chaque acteur progresse sur l’écoconception de ses produits. À la fin, en décembre, une société remportera le concours. Mais toutes auront gagné, au final, car elles auront réfléchi à optimiser une fonctionnalité, notamment. Y compris sur des questions éthiques. Concrètement, ce n’est pas uniquement basé sur les serveurs, la fluidité, le temps de chargement des pages, etc. Mais il faut réfléchir aux textes qui sont en ligne, chercher à les rendre le plus inclusif possible. Sur la question du genre, en particulier, il pourrait y avoir plusieurs choix et non pas juste « madame » et « monsieur » de façon automatique dans les interfaces, les applis, les newsletters. Le chantier peut être assez lourd.
Vous vouliez travailler pour une entreprise qui partage vos valeurs, vous avez dit. Est-ce que vous avez eu un déclic à un moment dans votre vie ? A quand remonte la prise de conscience ?
J’ai eu deux enfants et c’est vrai que c’est important de se questionner sur la planète qu’on leur laisse. Mais c’est surtout que j’ai pu me le permettre, financièrement. J’ai une certaine stabilité. Il y a 4 ans, quand j‘étais encore en freelance, je travaillais pour différents types de secteurs, comme le bancaire ou l’immobilier. Je montais mon entreprise, donc j’avais besoin de missions, de projets. J’ai quand même dit non à une compagnie dans le secteur du tabac. Maintenant, je serais plus sélective, je pense, si j‘étais encore à mon compte.
J’imagine qu’une personne qui sort d’une école de design et qui a besoin de bosser et payer le loyer va choisir une entreprise pour la stabilité qu’elle va lui assurer, avant de juger l’éthique et la démarche écologique de l’entreprise. Nous sommes sur un marché tendu actuellement. Beaucoup de product designers pour peu de postes ouverts.
Au-delà de votre vie professionnelle, est-ce que vous cherchez également à limiter votre empreinte ? Et de quelle façon ?
Oui, je prends en compte mon impact sur l’environnement et le système dans la plupart de mes actes personnels. J’achète mes vêtements et ceux de mes enfants en brocantes ainsi que mon mobilier et ma décoration. J’ai rénové ma maison en optimisant son isolation. Je me déplace essentiellement à vélo. Je me fournis en fruits et en légumes dans une ferme à côté de chez moi. La vie à Nancy m’a permis d’accentuer ces démarches plus facilement. A Nancy, j’ai besoin de moins, et je vis mieux !
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