Des vers ramenés à la vie après 46 000 ans passés sous la glace de Sibérie

Par Charlotte Combret , le 3 août 2023 - 3 minutes de lecture
Le lac Baïkal en Sibérie

Le lac Baïkal en Sibérie. Crédit : Natalia Fedosenko / TASS / Sipa USA / SIPA

Deux vers congelés reviennent à la vie, après des millénaires passés sous des tonnes de glace sibérienne. Ils ont connu l’époque où les tigres à dents de sabre, les mammouths laineux et les élans géants sillonnaient encore la surface de la Terre. 

Les doyens du vivant

Il y a de cela des dizaines de milliers d’années, à la fin du Pléistocène, des vers, non pas de terre, mais de glace, coulaient des jours paisibles en Sibérie, au nord-est de la Russie. Prisonniers du froid qui aurait pu leur assurer une mort certaine, deux d’entre eux sont ramenés de l’au-delà par une équipe de chercheurs locaux, menée par Anastasia Shatilovich. Nous sommes en 2018, quand le morceau de permafrost dans lequel ils reposent à près de 40 mètres de profondeur, est remonté, décongelé et analysé.

Cinq années plus tard, le 27 juillet 2023, ce sont des scientifiques allemands qui publient les résultats de leur étude dans la revue PLOS Genetics. Leurs découvertes sont pour le moins vertigineuses. Les deux nématodes, issues d’une espèce jusqu’ici méconnue, auraient entre 45 839 et 47 769 ans ! Cette datation hors du commun, réalisée à partir du matériel végétal conservé dans le pergélisol, fait de ces vers microscopiques, la plus ancienne forme de vie sur Terre.

Par quel miracle ?

Le mythe de la congélation comme moyen d’accès à la vie éternelle, renaît en même temps que ces deux vers glacés d’à peine un millimètre, désormais nommés Panagrolaimus kolymaensis. Notre duo de miraculés sans pattes est en fait resté tout ce temps dans un état de cryptobiose. Autrement dit, tous deux ont mis naturellement en pause leur métabolisme avant de plonger dans un sommeil profond. Ce mécanisme de survie leur a permis de résister à des températures glaciales, mais aussi et surtout, de supporter l’absence d’eau et d’oxygène. Une fois libérés des profondeurs du gel sibérien, Anastasia Shatilovich n’a eu qu’à les réhydrater pour les ressusciter.

En Sibérie, le permafrost est le refuge blanc de nombreux organismes datant de l’ère préhistorique, d’espèces animales, de bactéries et potentiellement, de virus. Tous ne semblent pas bons à être ramenés à la vie. Selon les scientifiques, la fonte des glaces représente même un risque sanitaire non négligeable. 

Dans tous les cas, « la survie dans des environnements extrêmes pendant des périodes prolongées est un défi dont seuls quelques organismes sont capables », comme le précisent les auteurs de l’étude. Ce n’est donc pas demain la veille que les fans d’Hibernatus verront leur rêve d’immortalité se réaliser.

Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

Voir les publications de l'auteur