Électricité : le gouvernement veut tester la limitation forcée de la consommation sur 200 000 foyers

Par Charlotte Combret , le 6 décembre 2023 - 4 minutes de lecture
Le boîtier Linky d’Enedis permet d'abaisser temporairement le seuil de puissance maximale dont dispose un client

Le boîtier Linky d’Enedis permet d’abaisser temporairement le seuil de puissance maximale dont dispose un client. Crédit : Chamussy / SIPA

Le gouvernement planche depuis un mois et demi sur un projet de décret pour expérimenter cet hiver une « limitation temporaire » de la consommation d’électricité de milliers de Français. Un outil qui permettra d’éviter des coupures programmées en cas de tension extrême sur le réseau, d’après le ministère de la Transition énergétique. Ce décret a été validé jeudi 30 novembre par le CSE (Conseil Supérieur de l’Energie) et devrait être publié incessamment sous peu.

L’information a été révélée par La Tribune mi-octobre, puis rapidement corroborée par l’exécutif. « Ce projet de texte définit les modalités d’une expérimentation relative à la limitation temporaire de puissance électrique disponible pour des clients résidentiels », a déclaré le ministère d’​​Agnès Pannier-Runacher. Une telle initiative serait-elle révélatrice d’une crainte du gouvernement face à un risque de black-out comme évoqué l’hiver passé ? Négatif selon Bercy. Ce projet d’expérimentation n’a « aucun lien avec la situation du système électrique pour cet hiver ». Alors qu’il commence à peine à se faire sentir du fait de températures record du mois d’octobre, « nous abordons l’hiver dans de bien meilleures conditions que l’hiver dernier » grâce à une moindre consommation et à la remontée en puissance du parc nucléaire, rassure le ministère. « La France est d’ailleurs exportatrice d’électricité depuis le début d’année 2023, à des niveaux proches de 2021 », alors qu’elle avait été importatrice nette sur la quasi-totalité de 2022, a-t-il encore souligné. 

Un outil préventif 

Pour autant, le gouvernement veut « déterminer » s’il est « techniquement possible de mettre en œuvre un nouvel outil pour sauvegarder le réseau électrique en cas de tension extrême, pour éviter des coupures (…) programmées », ces délestages tant redoutés lors des mois froids de 2022. « Notre responsabilité, c’est (…) de faire en sorte d’améliorer la résilience du système en expérimentant divers outils, pour tester leur efficacité », a justifié le ministre de la Transition énergétique. Contacté par l’AFP, le réseau de distribution d’électricité aux particuliers Enedis a expliqué avoir été sollicité par les pouvoirs publics pour « travailler à une nouvelle mesure de sauvegarde pour envisager la sécurisation du réseau électrique à moyen/long terme » et « éloigner le risque de coupures temporaires (…) qui restent l’ultime dispositif pour éviter une panne généralisée ». Une simple mesure de précaution, donc. 

200 000 personnes concernées

Concrètement, le test grandeur nature envisagé reviendrait à abaisser la puissance disponible des compteurs résidentiels Linky à 3 kilovoltampères (kVA). À titre de comparaison, celle-ci est généralement de 6kVA dans les foyers tricolores. Si ce procédé risque bien de réveiller la grogne des anti-Linky, ces compteurs communicants d’Enedis déployés en France depuis 2015, il « présenterait l’avantage de ne pas interrompre l’alimentation des clients et de préserver un niveau minimal d’alimentation pour les usages électriques de base (3kVA, correspondant à un radiateur, un ordinateur portable en charge, un réfrigérateur) », a détaillé Enedis. Le gouvernement compte effectuer avec une limitation de 2h maximum, une fois par jour. Le test sera mené en hiver, entre la date de publication du texte et le 31 mars 2024,  au moment où le réseau est le plus sollicité en raison des besoins de chauffage. Parmi les points négociés par rapport au projet de base, a notamment été ajouté pour les foyers concernés une compensation financière symbolique de 10 euros pour service rendu.

Dernier recours avant black-out

En cas de tensions sur le système électrique, d’autres moyens existent déjà avant d’en arriver au scénario ultime des coupures : la mobilisation des capacités de production, les importations d’électricité, la baisse de consommation volontaire des industriels ou encore les baisses de tension de 5% sur les appareils électriques. Comme c’est le cas pour les délestages, une baisse imposée de la puissance électrique dans les foyers français ne serait activée « que si tous les autres leviers étaient insuffisants pour éviter une coupure d’électricité généralisée (black-out) » précise le ministère.

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Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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