Photographier les rivières asséchées pour aider à les protéger

Par Charlotte Combret , le 29 juillet 2023 — Protection de l’environnement - 4 minutes de lecture
rivière asséchée

Une rivière asséchée à Bourgoin-Jallieu dans le Sud-Est de la France. Crédit Mourad ALLILI / SIPA / 2307180902

Parfois empreints d’un sentiment d’impuissance face à la crise climatique, nous sommes nombreux à nous demander comment agir à notre échelle. Voici un geste à réaliser facilement pour l’environnement, au détour d’une rivière un peu particulière.

Intermittentes et oubliées 

Toutes les rivières sont loin d’être permanentes. Une étude conduite par l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INREA) en 2021, nous apprend même que plus de la moitié des cours d’eau mondiaux sont naturellement intermittents. Autrement dit, certaines rivières cessent de s’écouler ou s’assèchent complètement, pendant une partie de l’année.

Essentiellement méconnues du grand public, elles le sont aussi des scientifiques, à leur grand regret. L’assèchement de ces cours d’eau est peu étudié, compris et cartographié. Par conséquent, les rivières intermittentes sont bien moins protégées que celles qui s’écoulent en permanence dans les différentes régions du globe. Pour y remédier, les équipes de l’INRAE ont mis en route une application en open-source inédite : DRYRivERS.

Le plan de l’INRAE

Dans le cadre d’un programme de sciences participatives, l’INRAE sollicite l’aide des promeneurs en forêt qui rencontreraient sur leur chemin, des cours d’eau plus ou moins secs. Le principe est simple : aller sur l’application, télécharger une photo du lit de la rivière, indiquer où il se trouve et décrire son état. Tout le monde peut ainsi aider les experts dans ce gigantesque travail de cartographie. Il faut dire que le périmètre d’étude est large. Rien qu’en France métropolitaine, pas moins de 30 000 cours d’eau traversent le territoire, sur près de 430 000 km !

En juillet 2023, un an après son lancement à l’échelle internationale, le projet DRYRivERS révèle de premiers résultats encourageants. Plus de 4 000 contributions ont déjà été enregistrées. Précieuse pour les scientifiques, la data collectée leur permet de suivre en temps réel l’évolution de nombreux cours d’eau dans le monde. Les équipes ont notamment pu constater la présence de rivières et ruisseaux intermittents dans toutes les régions du globe. Cette recherche scientifique a pour objectif final de faire reconnaître la prévalence et l’importance écologique des masses d’eau non pérennes.

À court d’eau

Ce projet collaboratif prend la forme d’un véritable outil de communication et de sensibilisation du grand public aux phénomènes d’assèchement des cours d’eau, qu’ils soient d’origine naturelle ou anthropique. Les rivières d’eau douce sont, en effet, essentielles au maintien de la biodiversité, des cycles biogéochimiques et plus largement, des sociétés humaines. Les cours d’eau non permanents, sont en particulier le refuge de nombreuses espèces adaptées aux cycles de présence et d’absence d’eau et représentent pour des millions de personnes la première ressource hydrique disponible. 

Pourtant, loin des regards, ils sont majoritairement exclus des actions de gestion et des programmes de conservation. Résultat, leur santé se dégrade rapidement, victime du pompage excessif, de la pollution et de la surpêche.

Dans un contexte de dérèglement climatique qui exacerbe la fréquence et l’intensité des épisodes de sécheresse, la question de l’eau reste ô combien centrale. Alors pendant l’été, ouvrez l’œil. Au cours de l’une de vos balades, vous pourriez bien tomber nez à nez avec une rivière intermittente, dont la photo ne sera sûrement pas très instagrammable, mais bien utile à la Science.

Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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