Planification écologique : que retenir de la présentation aux chefs de partis réunis à Matignon lundi 18 septembre ?
Accélérer sur la voiture électrique, rénover les logements, freiner sur les chaudières au gaz… Après plusieurs mois d’attente, Elisabeth Borne a présenté lundi 18 septembre 2023 à Matignon la « planification écologique » du gouvernement aux chefs des partis qui sont sortis « sceptiques » de leur rendez-vous où s’est invité le pouvoir d’achat.
La Première ministre a souhaité en début de réunion évoquer « les enjeux » de cette planification sans entrer dans les détails, alors qu’Emmanuel Macron a fait de l’urgence climatique une priorité de son second mandat et doit prendre la parole le lundi 25 septembre sur le sujet.
La France insoumise, grande absente
Ces deux heures à huis clos ont été « très utiles », selon Matignon, et l’absence de la France insoumise a été « collectivement regrettée ». Le coordinateur de LFI Manuel Bompard avait dénoncé « une nouvelle opération de communication », décision jugée « incohérente et irresponsable » par Elisabeth Borne, dans un tweet.
Réactions politiques : entre appels à l’action et débats sur les mesures
Selon les services de la Première ministre, le « diagnostic était totalement partagé » sur « l’ambition » et « un grand nombre des mesures du plan d’action ». La discussion a notamment porté sur sa « mise en œuvre » dans les territoires et son « financement », et sur le pouvoir d’achat.
A l’issue de la réunion qu’elle a qualifiée « d’oral de rattrapage », après la rencontre de Saint-Denis fin août où l’écologie avait été peu abordée, la secrétaire nationale d’EELV Marine Tondelier a salué « un constat très complet, très lucide et assez inédit ».
Mais « les réunions ne servent à rien s’il n’y a pas d’action », a-t-elle ajouté en réclamant un impôt sur les grandes fortunes « climatique » et une « loi de programmation des finances publiques » sur l’écologie.
Pouvoir d’achat : les chefs de partis sceptiques
« Une guerre contre le climat, ça suppose une économie de guerre et on en est très, très loin », a abondé le patron du Parti socialiste Olivier Faure. Le chef du Parti communiste Fabien Roussel était lui arrivé « sans illusions », désireux surtout de « faire baisser la facture » d’électricité et de gaz.
Sujet de crispation, la question de l’articulation entre écologie et pouvoir d’achat s’est invitée dans la réunion au moment où les prix de l’énergie et du carburant flambent.
Selon Matignon, « tous » les partis présents « s’accordent à dire que la réussite de cette transition repose notamment sur l’électricité décarbonée et qu’elle doit l’être à un prix compétitif », avec « un appel d’un grand nombre de participants à ce qu’on ait une régulation très forte » de son prix.
Dimanche, les oppositions avaient critiqué l’annonce d’Elisabeth Borne d’autoriser la vente à perte de carburant pour « baisser davantage les prix ». Pour la droite, Eric Ciotti a tiré un « bilan en demi-teinte » de cette planification, sans « perspective très claire sur les moyens d’y parvenir et de (la) financer ». Il réclame une conférence « sur les prix de l’énergie » et une baisse des taxes sur le gaz et l’électricité plutôt qu’une vente à perte, « placebo sur une jambe de bois » à ses yeux.
Les petites stations-service ne « pourront pas se permettre » une vente à perte, a estimé Mme Tondelier qui préfèrerait « taxer les super profits » de TotalEnergies ou donner des chèques carburant « à ceux qui en ont le plus besoin ».
Au nom du Rassemblement national, la députée européenne Mathilde Androuët a réclamé « une vraie rupture » avec « le libre-échange » qui « encourage la pollution » et déploré une « absence totale de souci du peuple » pour qui l’environnement est devenu « une contrainte ».
Une transition ambitieuse sous les projecteurs
L’exécutif ouvrait par ce rendez-vous une « séquence » d’une dizaine de jours sur le sujet. Un échange entre Elisabeth Borne et les membres du Conseil national de la refondation suivra ce mardi 19 septembre, avant la prise de parole d’Emmanuel Macron lundi 25 septembre, et la présentation du projet de budget le 27 septembre en Conseil des ministres.
En juillet, le gouvernement avait reporté la présentation de cette feuille de route, percutée notamment par les émeutes. Il promet désormais un plan « très concret » et « très opérationnel » afin « d’être au rendez-vous européen » de la baisse de 55 % des émissions nettes de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990, et de se « projeter vers la neutralité carbone en 2050 ».
En amont du projet de budget 2024, l’exécutif devra expliquer comment il entend répartir les 7 milliards d’euros supplémentaires promis.
Le gouvernement pourrait notamment financer une hausse du bonus écologique pour l’achat de véhicules électriques. Il promet aussi des réponses sur le financement des RER métropolitains ou des mesures pour des rénovations énergétiques de logements plus « performantes ».
D’ici à 2030, le gouvernement souhaite en outre parvenir « à supprimer 75% des chaudières au fioul », selon une synthèse datée de juillet.
(Avec AFP)