Canicule : comment expliquer cette vague de chaleur intense et tardive en septembre ?

Par Virginie Hilssone-Levy , le 6 septembre 2023 - 5 minutes de lecture
Sécheresse due à la canicule dans une culture de mais du Sud-Ouest de la France, Crédit Christian Bellavia/SIPA

Sécheresse due à la canicule dans une culture de mais du Sud-Ouest de la France, Crédit Christian Bellavia/SIPA

La vague de chaleur qui a débuté ce lundi sur la France est exceptionnelle par sa durabilité et son intensité. Plus de 200 records mensuels de chaleur ont d’ores et déjà été battus.

Les fortes chaleurs ont fait leur retour cette semaine, après un épisode de canicule exceptionnel qui était déjà survenu fin août. Depuis lundi 4 septembre, les thermomètres affichent des valeurs jusqu’à 10 degrés au-dessus des normales de saison dans de nombreuses régions. Un épisode que l’on peut déjà qualifier de remarquable, notamment en raison de son intensité et son extension géographique sur les trois quarts de la France.

Illustration d’une situation climatique en Omega. Crédit la Chaîne Météo
Lettre grecque Omega, Crédit OPEN / DPA / SCIENCE PHOTO LIBRARY VIA AFP

Ces températures élevées s’expliquent déjà par la configuration météorologique, que les prévisionnistes appellent « blocage en oméga ». Elles sont causées par la présence de deux dépressions : l’une sur l’Espagne, qui a entraîné de fortes pluies le week-end du 2 et 3 septembre sur une grande partie du territoire, et l’autre au large de la Grèce, à l’origine de précipitations torrentielles qui ont touché le pays. Ces deux centres d’action, dans leur déplacement, génèrent un vent de sud qui transporte de l’air très chaud venu d’Afrique. Plus au nord, un anticyclone présent dans la Manche agit comme un dôme de chaleur favorisant un ensoleillement abondant, qui réchauffe davantage la masse d’air. Cette circulation atmosphérique prend alors la forme de la lettre oméga. Une telle configuration en plein cœur de l’été aurait pu donner lieu à un épisode de canicule très intense. 

En septembre, alors que le soleil chauffe moins la masse d’air et que les journées sont plus courtes, la hausse des températures est freinée. Néanmoins, les températures restent remarquablement élevées pour cette période, avec une vague de chaleur persistante. Ces vagues de chaleur sont définies à partir de critères statistiques précis, notamment l’indicateur thermique national ou la température moyenne nationale. Pour être qualifiée de vague de chaleur, la température moyenne nationale doit être pendant au moins un jour supérieure ou égale à 25,3 °C, et supérieure ou égale à 23,4 °C pendant au moins 3 jours. 

Des températures très élevées 

C’est en ce moment le cas. Notre indicateur thermique national avoisine les 25,1 degré (moyennant les températures de la nuit et de la journée). Le lundi 4 septembre 2023 est devenu le jour le plus chaud jamais enregistré pour ce mois battant le précédent record de 24,67 °C, établi le 4 septembre 1949. Le lendemain, pour le deuxième jour consécutif, l’indicateur thermique national a atteint un niveau sans précédent en septembre, avec 24,9°C.

Les températures maximales sont remarquablement élevées sur la France, avec des écarts par rapport aux moyennes saisonnières dépassant les 10 degrés sur de nombreuses régions de la moitié nord, avec, à la clef, de nouveaux records de chaleur mensuel. Depuis le début de la semaine, plus de 200 records ont été battus, comme à Niort avec 36,6 °C (dépassant le précédent record de 35,7°C du 1er septembre 1961), à Cognac avec 36,5 °C, à Bourges avec 36,0 °C ou encore àLa Rochelle avec 34,5 °C (dépassant le précédent record de 34,4°C établi le 7 septembre 2021).

Pour illustrer la durée remarquable de cette vague de chaleur à venir, notons que Paris connaîtra des températures de plus de 30°C tous les jours jusqu’à dimanche prochain, ce qui représente une série de 9 jours consécutifs à plus de 30°C, une première en dehors de la période estivale.

Enfin, l’isotherme 0°C, qui représente l’altitude à laquelle la température est égale ou inférieure à 0°C, se situe actuellement à plus de 5 000 mètres, soit au-dessus du sommet du mont Blanc, ce qui est là aussi est inédit pour un mois de septembre.

Des vagues de chaleurs de plus en plus tardives 

Ce type d’évènement n’est pas rare en septembre, il faut remonter à l’année dernière, en 2022, pour trouver une vague de chaleur, avec un pic record le 12 : il avait alors fait jusqu’à 30°C dans le Finistère, 35°C à Nantes et ponctuellement 40°C dans les Landes.

Avant cela, la dernière vague de chaleur notable en septembre remonte à 2020 : du 12 au 19, des températures de 34,3°C avaient été enregistrées à Paris et de 36°C à Bourges, par exemple. Du 4 au 11 septembre 2006, une vague de chaleur avait touché principalement le sud de la France avec 35°C à Biarritz, 33°C à Caen et 31°C à Paris.

Beaucoup plus loin dans les archives, du 6 au 10 septembre 1911, après un été torride, une dernière vague de chaleur concernait toute la France : 38°C à Toulouse, 36°C à Paris, et 35°C à Brest.

Il est intéressant de noter que bien que les vagues de chaleur tardives en septembre ne soient pas rares, leur fréquence a augmenté depuis 2000. Celle que nous vivons actuellement est la septième en septembre depuis 1911, et 4 sont survenues après 2000. 

Enfin, et pour rappel, avec un excédent de température de l’ordre de +1,5°C par rapport à la normale 1991-2020, cet été 2023 se situe au 4ème rang des étés les plus chauds depuis 1900 en France, après les étés de 2003, 2022 et 2018.

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Virginie Hilssone-Levy

Virginie Hilssone-Lévy est journaliste, présentatrice spécialisée en météo, climat environnement pour différents chaînes de televison ou radio comme BFM TV, Mouv et FranceInfo. Elle crée du contenu digital sur ces thématiques qui la passionne sur ses réseaux ou pour celui de différents médias dont Deklic. Ses passions : la lecture, le sport et son chien Brooklyn.

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