Comprendre : qu’est-ce que l’écocide ?

Par Gaëlle Coudert , le 28 novembre 2023 - 4 minutes de lecture
Ecocide

Manifestation à Bonn en août 2023, organisée par Extinction Rebellion, Crédit photo : Ying Tang/NurPhoto via AFP

Le point sur la notion d’écocide, crime contre l’environnement, et les récentes évolutions qui vont dans le sens de sa reconnaissance.

Le 16 novembre 2023, le Parlement européen et les États membres sont parvenus à un accord allongeant la liste des crimes environnementaux et qui harmonise les sanctions prévues dans l’Union Européenne. Parmi les avancées notables de ce texte : la quasi-reconnaissance du crime d’écocide. En effet, le texte introduit la notion « d’infractions qualifiées » pour les crimes environnementaux qui causent « la destruction d’un écosystème ou d’un habitat dans un site protégé, ou des dommages à la qualité de l’air, du sol ou de l’eau ». « Elles incluraient des infractions comparables à l’écocide, aussi catastrophiques qu’une vaste pollution ou des feux de forêts à grande échelle », a décrit le Parlement européen dans un communiqué.

L’eurodéputée française Marie Toussaint (EELV) a salué cette « victoire collective » sur X (ex-Twitter), l’UE ayant « posé les bases de la reconnaissance de l’écocide ». « L’infraction reconnue pour les crimes les plus graves est très proche de celle du panel international de juristes sur l’écocide, mentionné dans le texte, qui fait écho aux efforts déjà menés au niveau national dans certains États tels que la Belgique », a-t-elle ajouté. Le Parlement et le Conseil devront encore valider formellement la directive, et une fois en vigueur, « les États membres devront inclure dans leur droit pénal des définitions plus précises des catégories d’infractions environnementales, ainsi que des sanctions dissuasives pour les contrevenants » a indiqué la Commission Européenne dans un communiqué. 

La députée, juriste de formation, se bat depuis déjà plusieurs années pour faire reconnaitre le crime d’écocide. En 2012, elle s’était engagée auprès de l’association « End Ecocide on Earth », et en 2015, elle a co-fondé l’association « Notre affaire à tous », à l’origine de « l’Affaire du siècle » intentée contre l’État pour inaction climatique.

Criminaliser l’atteinte à la nature

L’écocide est un acte criminel constitué par la grave atteinte à l’environnement entrainant des dommages majeurs à un ou plusieurs écosystèmes, et pouvant aboutir à leur destruction. Depuis 1947, la communauté internationale discute de ce concept pour décider ou non de l’intégrer dans le droit international, afin que ces atteintes puissent faire l’objet de condamnations pénales par la Cour Pénale Internationale.

À ce jour cependant, ce crime contre l’environnement n’est pas officiellement reconnu sur la scène internationale. L’avancée faite par l’Europe est donc un grand pas vers la reconnaissance du crime d’écocide au niveau planétaire, qui pourrait se faire par un amendement au statut de Rome qui liste et définit les crimes relevant de la Cour pénale internationale. À ce jour, il en existe quatre : le génocide, les crimes contre l’Humanité, les crimes de guerre et les crimes d’aggression. En 2021, des experts mandatés par l’association néerlandaise Stop Ecocide ont proposé une définition de l’écocide qui pourrait intégrer le statut de Rome. L’écocide consiste, selon cette définition, en des « actes illégaux ou arbitraires commis en sachant la réelle probabilité que ces actes causent à l’environnement des dommages graves qui soient étendus ou durables ». 

Les défenseurs de cette notion et de son intégration en droit international, notamment Stop Ecocide, soulignent qu’une criminalisation de l’écocide permet de rendre les personnes responsables d’actes ou de décisions qui entrainent des dommages environnementaux graves passibles de sanctions pénales comme des peines d’emprisonnement. Un symbole fort pour lever l’impunité des multinationales ou États à l’origine d’actes menant à la destruction des écosystèmes, et mettant en péril l’avenir de la planète et des générations futures.

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Gaëlle Coudert

Ancienne avocate parisienne reconvertie en journaliste basée dans les Pyrénées-Atlantiques, Gaëlle s’est spécialisée sur les sujets liés à l'écologie. Elle a cofondé le magazine basque Horizon(s), a été rédactrice en chef d'ID, l’Info Durable et rédige aujourd’hui des articles pour divers médias engagés dont Deklic. Ses passions : le sport (surf, yoga, randonnée) et la musique (guitariste et chanteuse du groupe Txango)

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