Connaissez-vous le droit d’accès à la nature ?
Il répond au doux nom de « allemansrätten » en Suède, de « allemannsretten » en Norvège ou encore de « jokamiehenoikeus » en Finlande : c’est le droit d’accès à la nature. Prenant racine dans les coutumes ancestrales des peuples autochtones d’Europe du Nord, il autorise tout un chacun à profiter des espaces naturels publics ou privés, dans la plus grande des libertés.
La nature reprend ses droits
La nature est un bien commun qui devrait être accessible à tous : tel est le principe porté par les pays qui ont adopté le droit d’accès à la nature. S’il existe sous différentes formes en Australie, en Nouvelle-Zélande ou en Amérique du Nord, du côté de l’Europe, c’est l’apanage des pays nordiques. L’Islande, la Norvège, la Suède, la Finlande ou encore l’Estonie reconnaissent le besoin fondamental de chaque individu à profiter des bienfaits de la nature. En vertu de ce droit, les citoyens et visiteurs de ces pays sont libres d’évoluer dans l’ensemble des zones naturelles, indépendamment de leur statut foncier. À l’intérieur de leurs frontières, chaque personne peut ainsi se promener dans un parc, cueillir des fleurs sauvages dans une forêt, nager dans un lac, planter sa tente sur une plage ou partir en randonnée au cœur des montagnes environnantes. Conditions sine qua none du contrat généralement passé avec mère nature : se tenir à distance des habitations, veiller à ne pas semer de déchets sur son passage et respecter la faune et la flore locales.
Plus d’accès, plus de responsabilité
Le lien entre nature et santé n’est plus un secret pour personne. En 1984 déjà, une étude menée par le chercheur Robert Ulric et publiée dans la revue Science concluait : « Regarder par la fenêtre améliore notre récupération après une opération chirurgicale ». Quelques années plus tard, en 2022, Michel Le Van Quyen, chercheur en neuroscience et directeur de recherche à l’INSERM, explique encore dans un ouvrage à quel point la proximité avec la nature renforce les mécanismes biologiques et cognitifs des êtres humains. Si la nature nous fait du bien, garantir son libre accès est certainement politique. Mais au-delà des considérations sanitaires, ce ticket d’entrée généralisé est également un moyen pour les citoyens de mieux connaître les territoires, de renforcer les liens émotionnels avec les écosystèmes, et à terme, de mieux les protéger. On tient là une belle illustration de la célèbre phrase de Jacques-Yves Cousteau : « On protège ce qu’on aime, on aime ce qu’on connaît ». En ce sens, les pays nordiques associent à cette réglementation différents programmes de préservation de l’environnement et partagent avec les visiteurs locaux et étrangers, de nombreuses recommandations.
Le droit d’accès à la nature en France ?
À ce jour, pas de trace de droit d’accès à la nature dans la loi française. Les espaces naturels privés sont uniquement accessibles aux intéressés selon le principe de tolérance. Autrement dit, à quelques exceptions près, l’autorisation d’entrée sur une zone privée est laissée au bon vouloir des propriétaires. Si selon Camille Girault, maître de conférence à l’Université Savoie Mont Blanc, « le droit de libre accès à la nature ne résout pas pour autant toute forme d’injustice et de conflictualité environnementales », il propose une interprétation plus intime et plus inclusive de notre rapport au monde.
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