Enfin un arrêté pour encadrer l’irrigation des cultures agricoles avec des eaux usées traitées !

Par Anaïs Hollard , le 28 décembre 2023 - 4 minutes de lecture
Arrosage des champs

© Konrad K/SIPA

Ce jeudi 28 décembre marque la publication, au Journal Officiel, d’un arrêté visant à encadrer l’irrigation de cultures agricoles à partir d’eaux usées traitées au préalable dans des stations d’épuration. Face aux sécheresses à répétition et l’indispensable nécessité de protéger les ressources naturelles, cette évolution sonne comme une excellente nouvelle pour la planète !

La réutilisation des eaux usées traitées : un procédé d’avenir

Les vagues de chaleur qui se sont abattues sur le territoire ces dernières années, au cours des périodes estivales, ont aussi été à l’origine de niveaux historiquement bas des nappes phréatiques. Ces phénomènes récurrents ont eu pour effet de pousser encore davantage la pression opérée sur les ressources en eau, et d’imposer la mise en place de solutions adaptées. C’est peut-être l’une d’entre elles qui a émergé, ce jeudi 28 décembre, par la voix d’un arrêté publié au Journal Officiel. « Cet arrêté du gouvernement prescrit des mesures (traitement, stockage, distribution, surveillance) destinées à « garantir la protection de la santé publique, humaine et animale, et de l’environnement ». Il est notamment précisé le niveau de qualité sanitaire que doivent atteindre, en fonction des cultures, ces eaux issues de stations d’épuration, aujourd’hui massivement rejetées dans le milieu naturel ».

Il est à noter que les eaux usées désignent l’ensemble des eaux souillées par l’activité humaine, soit directement suite à un usage domestique ou économique (industriel, artisanal, agricole…), soit via le ruissellement en milieu urbain notamment. À ce jour, l’essentiel de ces eaux est massivement rejeté en milieu naturel. Toutefois, la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) en irrigation agricole est depuis longtemps un enjeu fondamental en matière de protection de l’environnement. En effet, elle présente non seulement l’avantage de réduire la pression sur les ressources en eau, mais également de valoriser des eaux traitées, riches en nutriments organiques.

Une chance pour la France de rattraper son retard

La Jordanie fait figure de précurseur en matière de réutilisation de l’eau, pour irriguer les cultures « dès la fin des années 1970 […] avant que d’autres pays arabes s’y mettent », soulignait un rapport interministériel d’octobre dernier. « Israël est aujourd’hui en pointe avec près de 50 % des terres cultivées arrosées avec de l’eau recyclée […]. Peuvent être aussi cités Doha au Qatar, avec 245 000 m3 par jour de REUT destinés à l’irrigation, ou encore l’Italie avec des cultures maraîchères dans la région de Milan », selon ce rapport.

Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement, à ce jour, « seulement 11 % » des eaux usées sont intentionnellement réutilisées à l’échelle de la planète. Du côté de la France, ce chiffre s’élèverait même à moins de 1 % en France. Cette nouvelle réglementation pourrait donc marquer une avancée significative en matière de recyclage et d’optimisation des ressources naturelles.

Ce n’est pas la première fois que le sujet du recyclage de l’eau est mis sur la table, puisque le 14 décembre 2023, un arrêté fixait déjà un cadre similaire pour l’arrosage des espaces verts. Un autre texte est également attendu par le secteur agroalimentaire, qui compte bien réutiliser l’eau traitée dans les stations d’épuration des usines. 

L’un des freins majeurs de ce procédé reste encore son coût. En 2022, un rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), qui dépend du ministère de l’Agriculture estimait qu’il fallait compter « entre 0,8 et 1 EUR/m3, contre 0,05 à 0,20 EUR/m3 pour une irrigation classique ». Le CGAAER ajoutait au passage qu’il n’y avait pas de « solution miracle » face à la raréfaction de la ressource en eau et qu’il importait « déjà d’essayer de diminuer la demande en eau d’irrigation des cultures ».

Ce nouvel arrêté devrait néanmoins contribuer à lever les freins réglementaires en matière de valorisation des eaux non conventionnelles en France, et largement participer au recyclage de cette ressource précieuse.

(Avec AFP)

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Anaïs Hollard

Captivée par les sujets liés à l’énergie, Anaïs a longtemps collaboré avec de grands acteurs du secteur, avant de choisir la voie de l’indépendance, en tant que journaliste web. Aujourd’hui, elle continue de délivrer son expertise en matière d’énergie et de transition écologique. Ses passions : la lecture, l’écriture (forcément) et les DIY créatifs !

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