Joe Biden suspend la construction de terminaux gaziers d’exportation vers l’Europe

Par Anaïs Hollard , le 26 janvier 2024 - 4 minutes de lecture
Joe Biden

© Adam Bettcher/AP/SIPA

C’est la bonne nouvelle de ce vendredi 26 janvier. Alors que début décembre, plus de 250 organisations et groupes de défense de l’environnement avaient demandé à l’actuel président des États-Unis de ne plus autoriser de nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié, l’appel semble enfin avoir été entendu.

Une pause pour prendre en compte « ce qu’est vraiment la crise climatique »

Le président américain Joe Biden a annoncé, ce vendredi 26 janvier, un moratoire sur la construction de nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL), citant la « menace » climatique. Un coup d’arrêt pour une industrie en pleine accélération, mais un véritable coup de pouce pour l’environnement. « Cette pause sur les autorisations [de terminaux] GNL prend en compte ce qu’est vraiment la crise climatique : une menace existentielle », a écrit le chef de l’État américain dans une déclaration. Une annonce qui intervient alors même que la campagne présidentielle bat son plein. Joe Biden semble tout résolu à faire de l’œil à son aile écologiste. Outre la probable stratégie politique que suggère cette décision, elle n’en reste pas moins cohérente, compte tenu de la politique environnementale forte menée par Biden tout au long de son mandat. Le chef d’État est notamment à l’origine d’un vaste plan climat, qui comprend une enveloppe considérable. Il s’agit du plus grand investissement jamais engagé aux Etats-Unis pour le climat : 370 milliards de dollars (environ 360 milliards d’euros) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030. À la veille d’un face à face électoral qui promet d’être musclé avec l’ex chef d’État Donald Trump, résolument climatosceptique – malgré l’évident consensus scientifique – Biden garde donc le cap en assumant plus que jamais une politique orientée en faveur du climat et de l’environnement.

« Les républicains +MAGA+ [le slogan de Donald Trump] nient l’urgence de la crise climatique, condamnant le peuple américain à un avenir dangereux, mon gouvernement ne restera pas passif », a affirmé Joe Biden. « Nous ne céderons pas aux intérêts particuliers ». « À mesure que les exportations augmentent, nous devons examiner les demandes d’exportation [de GNL] à la lumière des analyses les plus récentes sur le plan économique, environnemental et de la sécurité nationale », a de son côté déclaré la ministre de l’Energie, Jennifer Granholm, lors d’une conférence téléphonique.

79% de la production de GNL provient du gaz de schiste

Dopés par l’envolée de la production du gaz de schiste, les Etats-Unis sont déjà le premier exportateur mondial de GNL, selon des données publiées par l’organisation internationale Cedigaz pour le premier semestre 2023. Sept terminaux d’exportation de GNL sont déjà opérationnels aux Etats-Unis, assurant environ 328 millions de mètres cubes par jour, selon l’agence américaine d’information sur l’énergie (EIA).

Pour rappel et comme le souligne Fanny Pointet, responsable du transport maritime en France pour l’ONG Transport et Environnement, le GNL fait figure de désastre sur le plan climatique, avec un bilan désastreux. « Premièrement, parce que cela reste une énergie fossile émettrice de CO2 même si les énergéticiens disent que l’on peut avoir une réduction d’à peu près 20% des émissions ». Ensuite, cet hydrocarbure est composé à 95% de méthane, particulièrement nocif pour le réchauffement climatique. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) ce gaz a un pouvoir réchauffant 80 fois supérieur au CO2 sur une période de 20 ans. Enfin, aux Etats-Unis, 79% de la production de GNL provient du gaz de schiste, selon l’administration en charge de l’énergie. Le procédé pour extraire ce gaz, la fracturation hydraulique, est pointé du doigt pour les dégâts qu’il cause sur l’environnement. En France, l’extraction du gaz de schiste est d’ailleurs interdite.

Malgré toutes ces problématiques, l’an dernier, environ la moitié des exportations de GNL sont allées à l’Europe, selon la Maison Blanche.

Anticipant le moratoire évoqué par plusieurs médias américains, l’organisation de défense de l’environnement Sierra Club avait estimé qu’une telle décision « représenterait un changement de politique positif et significatif ».

(Avec AFP)

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Anaïs Hollard

Captivée par les sujets liés à l’énergie, Anaïs a longtemps collaboré avec de grands acteurs du secteur, avant de choisir la voie de l’indépendance, en tant que journaliste web. Aujourd’hui, elle continue de délivrer son expertise en matière d’énergie et de transition écologique. Ses passions : la lecture, l’écriture (forcément) et les DIY créatifs !

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