La Grèce devient le premier pays européen à interdire le chalutage de fond dans ses aires marines protégées
À l’issue de la neuvième conférence mondiale « Notre océan » qui s’est tenue à Athènes du 15 au 17 avril, la Grèce devient le premier pays d’Europe à annoncer l’interdiction du chalutage de fond dans l’ensemble de ses parcs nationaux et aires marines protégées. Plus de 11,5 milliards de dollars de promesses de dons pour la protection des océans ont également été formulées.
« Nous interdirons le chalutage de fond dans nos parcs nationaux d’ici 2026 et dans toutes les zones marines protégées d’ici 2030 » a annoncé le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis au deuxième jour de cette conférence comptant des délégations de quelque 130 pays et organisations, ajoutant que sera mis en place un système de surveillance de pointe, comprenant des drones, afin de faire respecter la mesure.
« L’océan nous envoie des signaux de détresse. Bien avant que nous comprenions le changement climatique, l’océan était déjà attaqué par la surexploitation et la pollution », a rappelé M. Mitsotakis. Au total, ce sont ainsi 30% des eaux territoriales grecques qui seront réellement protégées.
Le gouvernement grec a en outre déclaré que 21 initiatives, dotées d’un budget de 780 millions d’euros, étaient en cours pour la protection de la biodiversité marine. La semaine passée, c’est la création de deux nouveaux parcs nationaux, un dans la mer Ionienne (ouest) sur près de 12% des eaux territoriales grecques pour protéger les mammifères marins, les phoques et les tortues, et un autre dans la mer Égée (est) sur 6,61% d’entre elles, afin de préserver les oiseaux marins, qu’il avait présenté.
« Énormissime nouvelle »
« C’est la meilleure nouvelle que j’ai entendue depuis des années pour l’océan » réagit sur LinkedIn Claire Nouvian, fondatrice de l’association Bloom. « La Grèce a donné une leçon magistrale au reste du monde en annonçant l’interdiction du chalutage de fond » partage-t-elle.
Si l’engagement inattendu de la Grèce ravit les défenseurs de l’environnement, la France en revanche, déçoit. Pour celle dont l’ONG se bat contre la destruction de l’océan, la conférence s’est ainsi muée en « sommet de la honte » pour le pays. « Tous les regards étaient tournés vers la France, 1er espace maritime européen et 2ème au niveau mondial, mais qui protège moins de 0,1% de ses eaux métropolitaines » souligne Claire Nouvian. Mais au même moment, la France monte au créneau « pour lutter CONTRE la protection décidée par le Royaume-Uni » dénonce-t-elle.
Pour cause, la France est accusée d’hypocrisie par les défenseurs de l’océan, dont l’ONG Bloom, dans le cadre d’un différend post-Brexit sur les droits de pêche. Le pays a lancé une protestation officielle après que le Royaume-Uni ait décidé d’interdire le chalutage de fond dans certaines parties de ses eaux territoriales dans le but de protéger les habitats marins vulnérables.
« Au comble de l’irresponsabilité, la droite macroniste, l’extrême-droite et la droite conservatrice ont une nouvelle fois décidé de voler au secours du lobby du chalut et d’œuvrer contre l’intérêt des citoyens en ignorant les enjeux écologiques et sociaux sans précédent de notre époque » conclut Claire Nouvian, rappelant que 2024 a pourtant été déclarée « année de la mer » par le chef de l’État. La goutte de trop ?
10,8 milliards d’euros pour « Notre océan »
En attendant à Athènes, les promesses d’action semblent être au rendez-vous. Seule conférence à aborder toutes les questions liées aux océans en même temps, « Notre océan » avait été organisée pour la première fois en 2014. Lors du précédent sommet tenu au Panama en mars 2023, les participants avaient promis d’investir 19 milliards de dollars (17,8 milliards d’euros) dans des initiatives favorables à la protection du plus grand puits de carbone de la planète.
Cette année, « les participants se sont engagés dans environ 500 actions. Nous avons également eu un total de plus de 11,5 milliards de dollars (10,8 milliards d’euros) d’engagements », a déclaré le ministre grec des Affaires étrangères George Gerapetritis à la télévision d’État ERT. De son côté, l’UE a formulé 40 engagements pour 2024, totalisant 3,5 milliards d’euros. « Ils représentent le montant le plus important jamais annoncé par l’Union européenne depuis le début de notre conférence », a déclaré M. Gerapetritis.
Le sommet international annuel sur la sauvegarde des océans de 2024 a insisté sur les questions du tourisme durable dans les régions côtières et insulaires, du transport maritime vert, de la réduction des plastiques et microplastiques et de la transition verte de la Méditerranée. Alors que la prochaine édition de « Notre océan » aura lieu à Busan, en Corée du Sud, plus de 160 ONG et personnalités ont lancé en urgence une grande coalition citoyenne pour la protection de l’océan en France, qui autorise toujours le chalutage dans ses aires marines dites protégées.
À lire aussi :
Chalutage de fond : la « déforestation sous-marine » libère des tonnes de CO₂ dans l’atmosphère
Les scientifiques sonnent l’alarme face au réchauffement dramatique des océans
Le niveau des océans pourrait augmenter de 20 centimètres d’ici 2050, alerte la NASA