Colère des agriculteurs : comment le gouvernement a mis le climat en sourdine
Face à la mobilisation des agriculteurs, le gouvernement a annoncé plusieurs séries de mesures, dénoncées pour certaines comme un recul environnemental. On fait le point.
Les annonces faites jeudi 1er février par Gabriel Attal ont mis un frein à la mobilisation massive des agriculteurs entamée en janvier 2024. La plupart des demandes de la FNSEA, le syndicat majoritaire, ont été entendues par l’exécutif. La FNSEA et le syndicat des jeunes agriculteurs ont ainsi appelé à lever les blocages en fin de semaine dernière, et à « rentrer dans une nouvelle forme de mobilisation ». La confédération paysanne, qui défend un modèle agroécologique, appelait, quant à elle, jeudi soir, les agriculteurs à « poursuivre la mobilisation ». Mobilisation qui a pris fin deux jours plus tard, la police ayant alors délogé ces manifestants. « Il y a beaucoup de reculs environnementaux dans les annonces d’aujourd’hui qui ne nous satisfont pas, particulièrement à la Confédération paysanne » avait réagi Véronique Marchesseau, secrétaire générale de la Confédération paysanne, au micro de France Info jeudi 1er février. Des mesures également dénoncées par certaines ONG environnementales, dont le WWF, qui a fustige un « recul majeur » en particulier s’agissant de la suspension du plan Ecophyto.
La suspension du plan Ecophyto
Parmi les mesures évoquées jeudi 1er février, le gouvernement a promis que le plan Ecophyto visant à réduire l’usage des pesticides serait mis « en pause ». La 4ème mouture du plan, appelée « Ecophyto 2030 », visant à réduire de 50 % l’usage des pesticides d’ici 2030 pour protéger la biodiversité était en fin de consultation. La « pause » promise, à la demande des syndicats majoritaires devrait être faite, selon Gabriel Attal, « le temps de mettre en place un nouvel indicateur » pour substituer l’actuel indicateur, le « Nodu », contesté par certaines organisations agricoles. Cette annonce en particulier a suscité la colère des ONG environnementales. Pour Jean Burkard, du WWF France, il s’agit d’un « signal désastreux ». « La pollution chimique est l’un des principaux facteurs responsables du déclin de la biodiversité animale et végétale, au même niveau que le changement climatique », a-t-il rappelé. « Le Nodu nous a permis de voir que la France n’a pas rempli ses objectifs depuis près de 15 ans : 15 ans d’échec pour mettre en pause, ça pose question », s’est aussi étonné Thomas Uthayakumar, de la Fondation pour la Nature et l’Homme, auprès de l’AFP.
L’assouplissement des règles obligeant les agriculteurs à mettre en jachère une partie de leurs terres
S’agissant des jachères, le gouvernement a obtenu de la Commission européenne la proposition de ne pouvoir appliquer que partiellement, en 2024, la disposition prévue dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), qui impose à chaque exploitation un taux de 4 % de jachères ou en infrastructures agroécologiques (IAE), qui comprennent les haies, les arbres, les bosquets, les fossés ou les mares. « Ces réserves de biodiversité sont utiles aussi aux agriculteurs parce que le jour où il n’y a plus rien, il n’y aura plus que des ravageurs », avait souligné à l’AFP François Veillerette, porte-parole de l’ONG Générations Futures.
Dans la même veine, le Premier ministre a annoncé une dérogation à l’obligation de réimplanter des prairies dans les départements où trop de terres ont été transformées en terres arables. « Nous défendrons une évolution du ratio prairies et des prairies sensibles. Dans l’attente d’évolutions au niveau européen, sur ce point, nous appliquerons une dérogation à l’obligation de réimplantation pendant un an », a annoncé le Premier ministre. Autre « pause » annoncée : celle du projet de cartographie des zones humides, pourtant en voie de forte disparition.
L’OFB (Office Français de la Biodiversité) mis sous tutelle
Dès le 26 février, pour répondre aux demandes des manifestants, qui dénonçaient des « contrôles excessifs », le gouvernement a annoncé des mesures concernant l’OFB, dont les agents sont garants du respect du droit de l’environnement. Parmi elles, le placement de l’établissement sous la tutelle des préfets, pour « faire baisser la pression » des contrôles.
À lire aussi :
Pour les ONG, l’agroécologie est la réponse à la colère des agriculteurs