Dinopedia : une couleuvre pourrait-elle faire disparaître les dinosaures à Trévoux ?

Par Charlotte Combret , le 17 avril 2024 - 5 minutes de lecture
Thomas Brail, fondateur du GNSA

Thomas Brail, fondateur du GNSA. Crédit : Alain Pitton / NurPhoto / AFP

Alors qu’un parc à thème sur les dinosaures est en passe de voir le jour à Trévoux, dans l’Ain, citoyens et associations poursuivent la mobilisation, déjà entamée depuis plusieurs mois, contre le chantier démarré « en toute illégalité ». À l’occasion du dernier rassemblement tenu aux abords du site samedi 13 avril, le militant et défenseur des arbres Thomas Brail a fait la découverte d’une espèce protégée qui pourrait faire basculer le projet.

Des espaces naturels en voie de disparition détruits pour mettre à l’honneur des espèces animales disparues. Voilà un énième paradoxe moderne contre lequel se lève depuis mars 2023 près de Lyon, un collectif citoyen. Le CNAD Trévoux (Collectif Non Aux Dinos) rejoint par de nombreuses associations – le Groupe National de Surveillance des Arbres (GNSA), France Nature Environnement (FNE), la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), Les Soulèvements de la Terre, Écologie Citoyenneté Solidarité (EcoCiSo) – continue d’alerter les autorités compétentes et l’opinion publique sur les nombreuses irrégularités qui entourent le démarrage du chantier Dinopedia alors même que « l’inventaire floristique et faunistique du site réaménagé a révélé la présence d’espèces protégées et menacées ». De fait, le projet est implanté sur une zone humide, réserve de biodiversité, ainsi que sur un espace boisé, tous deux abritant de nombreuses espèces à préserver, prévient le collectif.

La couleuvre verte et jaune, espèce protégée

Parmi les espèces répertoriées à Trévoux se trouvent notamment le crapaud Alyte accoucheur, espèce strictement protégée de la Convention de Berne dont la conservation nécessite notamment une « stricte protection des sites de reproduction » ou encore la bécasse des marais, classée en danger critique dans la liste rouge des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), dont il ne resterait plus qu’une centaine de couples en France, d’après un communiqué publié par le CNAD Trévoux en mars 2024.

Mais c’est une autre espèce que va découvrir samedi 13 avril Thomas Brail, figure de proue de la lutte contre le projet d’autoroute reliant Castres à Toulouse venue sur le site apporter son soutien : une couleuvre verte et jaune. « Nous avons découvert une espèce sur la liste Rouge. Nous interpellons la préfète, le maire et le porteur de projet pour revoir leur copie » annonce-t-il sur son compte Instagram, évoquant un « projet désastreux » à « très fort enjeu environnemental ». Après la mésange bleue pour stopper l’A69, la couleuvre pour Dinopedia ? Pour l’heure, la préfecture n’a pas encore réagi.

Une couleuvre verte et jaune
Une couleuvre verte et jaune. Crédit : LUQUET M / HorizonFeatures /Leemage / AFP

Projet écocide, chantier illégal

En attendant, le Collectif Non Aux Dinos demande une intervention rapide des organismes d’État pour « préserver les espèces et les zones naturelles précieuses menacées » et réclame a minima la suspension, sinon l’annulation, du projet Dinopedia Parc en raison des nombreuses irrégularités observées sur place. Outre le « saccage écologique et patrimonial » à venir, les militants attirent l’attention sur le caractère illégal des travaux déjà commencé sur le terrain, « alors qu’aucun permis d’aménager ni aucun permis de démolir n’est affiché ni sur site ni en mairie », deux démarches administratives pourtant obligatoires. Aucune étude d’impact, ni enquête publique n’a en parallèle été menée, elles-aussi usuellement de rigueur pour l’installation d’un tel parc à thème. 

Enfin, les conditions de la « location-vente » accordées au promoteur de Dinopedia interrogent les concitoyens, lesquels déplorent par le biais de leur avocat, « un prêt à taux zéro accordé par la mairie pour les intérêts d’un projet économique privé ». Le CNAD considère ainsi que ce terrain, propriété de la commune et « bien commun », est « sacrifié au profit des intérêts économiques d’un privé, bénéficiant d’un portage financier publique ».

L’avenir de Dinopedia ?

Devant ce qu’il considère être « un passage en force du promoteur », le collectif citoyen refuse de s’incliner. La justice est saisie, plusieurs recours ont été déposés. Quant à la découverte de la présence sur le site de la couleuvre verte et jaune, espèce protégée présente sur la liste rouge de l’UICN, la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) et l’Office Français de la Biodiversité (OFB) en sont informés, confirme Thomas Brail.

Pour sa part, la municipalité a jusqu’ici assuré que le chantier respectait bien les règles d’urbanisme tandis qu’elle défend le potentiel pédagogique et touristique du parc à thème. Si les recours sont rejetés, Dinopedia ouvrira ses portes à Trévoux en juin prochain.

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Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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