Entre terrain et activisme : la campagne décalée de Marie Toussaint pour les européennes
Lancée dans la course européenne depuis décembre, la tête de liste des écologistes Marie Toussaint, à la peine dans les sondages et en manque de notoriété, mise sur une campagne décalée, alliant terrain et activisme.
Action coup de poing dans un Monoprix parisien pour dénoncer les polluants dans les produits de consommation, actions dans un Carrefour à Lyon contre les marges de la grande distribution sur les produits agricoles ou devant la Tour TotalEnergies à La Défense pour que l’Europe prenne le contrôle des groupe pétrogaziers européens. « L’activisme est un des moyens choisis depuis toujours par la génération climat. Nous assumons ! », explique-t-elle sur X.
La candidate de 36 ans s’était distinguée dès le meeting de lancement de sa campagne en décembre en proposant sur scène une séance de « booty therapy », une danse basée sur le déhanchement, provoquant quelques railleries et critiques en interne.
7 à 8% dans les sondages
Certains dans son parti s’inquiètent de la voir patiner dans les intentions de vote, loin des 13,4% de Yannick Jadot en 2019 : alors que l’Europe est un des fondamentaux du projet écologiste, les sondages la donnent actuellement autour de 7 à 8%, derrière le candidat du PS et de Place Publique, Raphaël Glucksmann, et parfois derrière l’insoumise Manon Aubry.
Mais la patronne des écologistes Marine Tondelier répète que « 8%, c’est le même niveau que Yannick Jadot à la même époque en 2019 ». D’autant que la tête de liste est encore peu connue et ne bénéficie pas du même contexte. En 2019, « on avait de l’espoir, aujourd’hui on fait campagne avec le vent de face », souligne l’intéressée.
Ses concurrents à gauche ne sont pas tendres. « Toussaint, on ne la voit pas dans cette campagne, on ne sait pas ce qu’elle raconte », ose un cadre socialiste. « On entend plus Marine Tondelier que la tête de liste », ajoute un insoumis. Elle est partie « trop tôt » et « à contre-temps (…) Elle ne se positionne pas. Le danger c’est de disparaître, il faut cliver, pas être techno, dès qu’on parle d’Europe, ça emmerde les gens ».
Le tour de France
Cliver n’est pas le genre de Marie Toussaint, qui prône la « douceur » en politique et se refuse à jouer « la guerre des gauches ». Elle ne table pas non plus sur de gros meetings de plusieurs milliers de personnes comme ses concurrents. « Ce n’est pas le point fort » des écologistes, explique l’eurodéputé David Cormand. « En 2019, notre plus grosse réunion publique avait réuni 320 personnes et au final on a fait plus de 13% », rappelle-t-il.
Pour la cheffe des députés écologistes Cyrielle Chatelain, la candidate « s’installe ». « Elle ne fait pas le tour des plateaux télé, parce qu’elle fait le tour de France ». « Elle est plus dans une logique d’être présente sur le terrain, de rencontrer la population, les militants », confirme son entourage.
On l’a ainsi vue à Poitiers rencontrer des agriculteurs, à Saint-Malo manifester contre le plus grand chalutier pélagique du monde, à Bordeaux s’opposer à de nouveaux puits de pétrole sur le bassin d’Arcachon, à Aubagne évoquer les combats communs entre quartiers et ruralité, ou encore aux Antilles dénoncer la pollution au chlordécone.
« Faire de la politique c’est être citoyen engagé »
La juriste, qui a fait condamner l’État français en 2021 pour ses manquements dans la lutte contre le réchauffement climatique, est aussi allée soutenir à Toulouse des opposants du projet de l’autoroute A69, poursuivis pour des faits de violences.
« Je fais partie de ces gens qui considèrent que faire de la politique c’est être citoyen engagé », justifie l’eurodéputée qui s’est aussi distinguée au Parlement européen par son combat pour la reconnaissance de l’écocide. « Quelle que soit la couleur des sondages, on se bat en permanence, sur le terrain, dans les manifestations et dans les institutions ».
« Oui elle a un truc à installer », explique la députée Sandrine Rousseau, mais elle « a fait un choix très courageux d’une campagne différente » et « cohérente avec les valeurs qu’on défend : prendre soin, écouter, ralentir ». Et un élu local remarque : « la personnalité de la tête de liste, c’est chez nous que ça joue le moins. Pour nous c’est l’étiquette qui compte ».
(Avec AFP)
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