L’Anthropocène n’est pas (encore) la nouvelle ère
Un comité géologique a décidé, au mois de février 2024, que l’Anthropocène ne peut pas être considéré comme une nouvelle ère.
Sommes-nous entrés dans une nouvelle ère, celle de l’Anthropocène, qui serait marquée par le fait que les activités des humains ont eu des conséquences irréversibles sur la planète ? Non, selon un panel d’experts qui s’est prononcé sur la question au mois de février 2024. L’information du vote du Subcommission on Quaternary Stratigraphy (SQS), comité géologique qui devait se prononcer sur la question, a été révélée par le New York Times le 5 mars 2024. Ce vote aurait été la première étape d’une reconnaissance officielle de cette nouvelle ère par le Congrès géologique international.
La décision a été prise à une large majorité, 12 personnes contre et quatre pour, rapporte le New York Times, qui aurait eu accès au rapport confidentiel du SQS.
Ce vote n’est probablement pas définitif, car le 6 mars, deux personnes ont demandé la nullité de la procédure, arguant qu’elle n’aurait pas respecté les règles établies par la Commission Internationale sur la Stratigraphie (International Commission on Stratigraphy ou ICS). Affaire à suivre donc.
Toutefois, avant cette remise en question, le président de l’ICS, interrogé par Nature, avait précisé que la proposition de faire de l’anthropocène une nouvelle ère ne pouvait « aller plus loin » à la suite du vote du SQS, un sous-comité de la commission internationale. La décision, si elle est validée, serait ainsi définitive dans le cadre de cette procédure. Cela n’empêcherait pas toutefois l’étude d’une nouvelle proposition qui pourrait être formulée à l’avenir.
Nouvelle ère Vs nouvel événement
Les défenseurs de la proposition travaillaient sur la question depuis une quinzaine d’années. Pour eux, il est clair que l’humanité est devenue l’équivalent d’une force géologique qui a des impacts sur les cycles biogéochimiques de la planète : impacts sur l’atmosphère, la biosphère, l’hydrosphère ou encore la lithosphère.
Les activités humaines concernées sont notamment l’agriculture intensive, la déforestation, le développement des transports, des industries, de l’énergie, qui sont à l’origine d’une rupture des équilibres naturels de la planète et d’une extinction de masse de la biodiversité.
Selon la proposition étudiée au mois de février, l’ère de l’Anthropocène devrait démarrer en 1952, au moment où les retombées radioactives liées aux tests d’armes nucléaires ont pu être relevées. Le lieu choisi pour représenter ces modifications était le lac de Crawford du Canada (il faut un lieu témoin pour une nouvelle ère). L’arrivée de l’Anthropocène en 1952 marquerait la fin de l’ère de l’Holocène, qui a démarré il y a près de 12 000 ans.
Les scientifiques réticents à la proposition considèrent que cette date retenue serait trop restrictive et ne prendrait pas en compte la longue histoire des changements anthropogéniques, liés notamment à l’agriculture ou à la révolution industrielle. Ils ne réfutent cependant pas l’impact de l’Homme sur l’environnement. Si cela ne constitue pas, selon, eux, une nouvelle ère, l’Anthropocène pourrait être vue comme un « événement ». C’est ainsi qu’ont pu être qualifiés les extinctions de masse ou les expansions rapides de biodiversité.
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