Le changement climatique va amputer le PIB mondial de près d’un cinquième d’ici 2050, selon une étude
Le changement climatique causé par le CO2 déjà présent dans l’atmosphère amputera le PIB mondial de quelque 38 000 milliards de dollars d’ici 2050, soit près d’un cinquième, indépendamment des efforts pour limiter les émissions à l’avenir, met en garde une étude publiée mercredi 17 avril.
« Notre analyse montre que le changement climatique va causer des dommages économiques massifs au cours de ces 25 prochaines années dans quasiment tous les pays du monde, y compris les plus développés comme l’Allemagne, la France ou les États-Unis », indique Leonie Wenz, de l’Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique (PIK), qui publie avec ses collègues le résultat de ses recherches dans la revue Nature.
Baisse de 17% du PIB mondial
Ces pertes, qui équivalent à amputer le PIB mondial de 17% d’ici 2050, « sont le résultat de nos émissions passées », souligne-t-elle. Avec 1,2°C de réchauffement, la Terre souffre déjà d’une amplification désastreuse des canicules, des sécheresses, des inondations ou des tempêtes tropicales.
Mais la facture économique pourrait encore s’alourdir d’ici 2100 si la planète se réchauffait significativement au-delà de 2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, la limite haute de l’accord de Paris de 2015 – si bien qu’il est crucial de réduire les émissions le plus vite possible. Et les investissements pour rester à 2°C ne représenteraient qu’une fraction des dommages qui seraient évités, ont montré les chercheurs.
Les économistes divergent en général sur les sommes qui doivent être dépensées pour éviter les dommages climatiques : certains appellent à des investissements massifs immédiatement, tandis que d’autres pensent qu’il serait plus efficace d’attendre que les sociétés soient plus riches et les technologies plus avancées.
Les pays les moins émetteurs en première ligne
L’étude n’entre pas directement dans ce débat mais son chiffrage des immenses pertes économiques plaide pour une action ambitieuse et rapide, selon les auteurs et des observateurs extérieurs.
« Nos calculs sont tout à fait pertinents » dans cette réflexion, dit ainsi Leonie Wenz à l’AFP. Ils peuvent aussi aider les gouvernements à établir des stratégies d’adaptation au changement climatique, permettre aux entreprises d’évaluer les risques ou éclairer les négociations internationales sur les dommages subis par les pays en développement qui ont très peu contribué au réchauffement, ajoute la chercheuse.
« On prédit que les pays les moins responsables du changement climatique subiront des pertes de revenus 60% plus importantes que celles des pays aux plus hauts revenus et 40% plus importants que les pays aux émissions les plus élevées », relève Anders Levermann, du PIK. « Ces pays sont aussi ceux qui disposent du moins de ressources pour s’adapter », souligne-t-il.
40 années de données climatiques et économiques
Les chercheurs se sont fondés sur 40 années de données climatiques et économiques locales provenant de plus de 1 600 régions à travers le monde, plutôt que des statistiques nationales, leur permettant d’inclure des événements ignorés dans d’autres études comme les précipitations extrêmes.
Ils ont aussi pris en compte des fluctuations de température fines – et pas seulement des moyennes annuelles – et ont aussi intégré les conséquences d’un événement climatique extrême au-delà de la seule année où il s’est produit.
« En prenant en compte ces variables, les dégâts sont environ 50% plus importants que si l’on tenait seulement compte des changements de températures moyennes annuelles », sur lesquels se fondent la plupart des études précédentes, indique Leonie Wenz.
Coût de l’inaction > coût de l’action
Mais ces nouvelles estimations publiées mercredi pourraient encore rester prudentes, selon des observateurs.
« Elles sous-estiment probablement les coûts des effets du changement climatique », juge ainsi Bob Ward, de l’Institut Grantham sur le changement climatique à Londres, qui n’a pas participé à l’étude. Celle-ci ne tient ainsi pas compte des dommages liés à la montée du niveau des mers ou au dépérissement des grandes forêts tropicales, note-t-il.
Gernot Wagner, de la Columbia Business School à New York, voit surtout dans l’étude un appel à l’action : « les coûts de l’action ne représentent qu’une fraction des coûts d’un changement climatique non atténué ».
(Avec AFP)
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