Les Soulèvements de la Terre : retour sur l’histoire de ce collectif écologiste déterminé, et parfois décrié
Né il y a à peine plus de trois ans, ce collectif écologiste aux méthodes musclées et parfois même qualifié de radical, ne cesse de susciter de nombreuses réactions, jusqu’au cœur des plus hautes sphères politiques. L’été dernier, Les Soulèvements de la Terre ont ainsi été sous les feux des projecteurs pour s’être attirés les foudres du Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, Himself. Retour leurs actions, les réactions qu’ils ont suscitées, et leur lutte continue pour la protection de l’environnement.
Les origines des Soulèvements de la Terre
En moins de trois ans, les Soulèvements de la Terre se sont imposés comme un mouvement phare de l’écologie politique. Actions coups de poings, membres « ultra » investis et écho médiatique retentissant : il n’en fallait pas plus pour ériger le collectif en valeur sûre de la lutte en faveur de la protection du climat et de la biodiversité.
C’est en 2021, en pleine période post-Covid, que d’anciens membres de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes se réunissent, pour former ce qu’ils décrivent eux-mêmes comme une « coalition qui regroupe des dizaines de collectifs locaux, de fermes, de sections syndicales, d’ONGs à travers le pays ». Les premiers membres sont alors vite rejoints par des militants issus d’autres organisations et associations écologistes (Extinction Rebellion, Youth for Climate, Alternatiba, etc.), ainsi que par des syndicats (comme la Confédération paysanne), ce qui en fait un collectif particulièrement hétéroclite.
Fort de son expérience contestataire face au projet d’aéroport du Grand Ouest et bien décidé à corriger l’action – jugée trop inoffensive – des marches pour le climat de 2019, le mouvement frappe fort. Au programme : de nombreuses actions de désobéissance civile et de sabotage d’infrastructures industrielles considérées polluantes.
Après avoir attiré l’attention des médias et des réseaux sociaux dès l’été 2022, en réalisant des vendanges sauvages au cœur de parcelles de vignes situées dans le Var et considérées comme « accaparées » par LVMH, c’est toutefois en mars 2023 que la réputation des Soulèvements de la Terre prend de l’ampleur. A Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, de nombreux manifestants se sont rejoints pour contester la construction d’un réservoir d’eau sujet à controverse. C’est ici qu’ont éclaté de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les militants des Soulèvements de la Terre. Parmi les quelque 30 000 manifestants, le collectif avait dénombré pas moins de 200 blessés, dont 40 gravement, et deux dans un état critique. À la suite de ces événements, le 28 mars 2023, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a annoncé le lancement d’une procédure de dissolution à l’encontre des Soulèvements de la Terre.
Les Soulèvements de la Terre : Ennemi public numéro 1
En mars 2023, le gouvernement estime que « sous couvert de défendre la préservation de l’environnement », le mouvement « incite à la commission de sabotages et dégradations matérielles, y compris par la violence ». Des accusations d’une gravité particulière et un argumentaire qui aura suffi à Gérald Darmanin pour réclamer la dissolution du collectif, officialisée en conseil des ministres le 21 juin suivant. Mais grosse déconvenue quelques mois plus tard pour le ministre de l’Intérieur, puisque le jeudi 9 novembre, cette dissolution du mouvement écologiste est tout bonnement… annulée par décision du Conseil d’État !
Une saga judiciaire qui aura – ironiquement – permis aux Soulèvements de la Terre de croître davantage, grâce au ressort médiatique. En effet, pas moins de 150 000 personnes ont signé la pétition visant à faire annuler la dissolution du mouvement ; des soirées de soutien se sont multipliées sur le territoire et des centaines de comités locaux ont été créés. Il n’aura d’ailleurs pas fallu plus de deux mois après que le Conseil d’État a annulé la dissolution du mouvement écologiste pour que celui-ci ne repasse à l’action. Du 9 au 12 décembre dernier, une série d’actions coordonnées de sabotages visant le cimentier Lafarge a par exemple été menée. Samedi 17 février à Montmorot, une soixantaine de militants se sont réunis pour creuser une mare, afin de démontrer l’humidité de l’emplacement et lutter contre un projet d’urbanisation, etc. Accusé de radicalité et parfois d’ « écoterrorisme », le groupement ne cesse toutefois d’alerter sur les périls encourus au cœur de nos territoires, du fait de la multiplication des projets écocides. Par ailleurs, de nombreuses victoires juridiques se sont enchaînées : des mégabassines ont été jugées illégales et le projet de retenue d’eau de la Clusaz a été suspendu.
Les Soulèvements de la Terre : quelques dates phares
Pour enrichir votre compréhension des Soulèvements de la Terre, voici un aperçu des actions marquantes menées par ce collectif depuis sa création :
🗓️ Mars 2021 : Des manifestations sont organisées afin de lutter contre la destruction de bocages par une carrière de sable à Saint-Colomban en Loire-Atlantique et de jardins populaires à Besançon ou encore contre la construction d’une route à Le Pertuis.
🗓️ Mars 2022 : Les Soulèvements de la Terre manifestent aux abords du siège français de Bayer-Monsanto, pour lutter contre l’implantation en France du géant pharmaceutique et agrochimique allemand.
🗓️ Juin 2022 : Des actions sont menées contre une retenue d’eau à La Clusaz et l’artificialisation de terres agricoles à Pertuis dans le Vaucluse.
🗓️ Octobre 2022 : La lutte contre la « méga-bassine » de Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres débute, avec notamment une première manifestation qui rassemble plusieurs milliers de personnes.
🗓️ Décembre 2022 : Une centaine d’activistes des Soulèvements de la Terre pénètrent dans l’usine du cimentier Lafarge à Bouc-Bel-Air dans les Bouches-du-Rhône. Une action qui aura provoqué des dégâts estimés à 4 000 000 €.
🗓️ Mars 2023 : Un nouveau rassemblement est organisé à Sainte-Soline, réunissant plusieurs dizaines de milliers de participants.
🗓️ Juin 2023 : Les Soulèvements de la Terre participent à une manifestation contre le chantier de ligne ferroviaire entre Lyon et Turin, qui a réuni entre 3000 et 4000 manifestants dans la vallée de la Maurienne en Savoie.
🗓️ Octobre 2023 : Des mobilisations contre le projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres sont organisées, au cours desquelles sept personnes sont interpellées.
Et pour vous, quelles sont les dates clés à retenir parmi les nombreuses actions des Soulèvements de la Terre ?
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