Quelle est l’empreinte carbone du ferry ?
Pollue, pollue pas ? Telle est la question que se posent de nombreux·ses touristes soucieux·ses de réduire au maximum l’empreinte écologique de leurs déplacements. Alors, forcément, le ferry n’échappe pas à la règle. Est-ce que ce mode de transport emprunté chaque année par quelques millions de voyageur·se·s à travers le monde présente un impact négatif sur l’environnement ? Pour résumer, quelle est l’empreinte carbone du ferry ? On fait le point !
Est-ce que le ferry est polluant ?
En France, « on n’a pas de pétrole, mais on a des ferrys », aurait pu déclarer notre Valéry Giscard d’Estaing national. En effet, les grands ferrys (ou ferries, à votre convenance) sont une spécialité européenne et plus particulièrement française.
Sur l’Hexagone, on retrouve d’ailleurs pas moins de 21 ports desservis par les ferries. L’incontournable port de Calais, par exemple, est le plus fréquenté, avec 485 traversées par semaine1 ! Autant dire qu’avec un tel quota, la question de la pollution liée à ce mode de transport a de quoi préoccuper. D’autant que le transport maritime via ferry est l’une des rares alternatives à l’avion pour relier deux territoires séparés par la mer ou l’océan. À la question « est-ce que le ferry pollue ? », la réponse est invariablement oui. Cependant, l’impact environnemental de ce mode de transport dépend (comme souvent) de plusieurs facteurs et notamment son type de motorisation, son âge, son carburant ou encore son mode d’exploitation. Parmi les principales sources de pollution des ferries, il faut donc compter :
- Les émissions de gaz à effet de serre (GES) : les ferries tournent généralement au fioul lourd, un carburant très polluant, qui génère des émissions importantes de CO₂ et d’autres gaz comme le méthane ou l’oxyde d’azote (NOx). Et sans surprise, ces émissions contribuent au changement climatique et à la pollution de l’air.
- La pollution atmosphérique locale : les particules fines émises par les ferries affectent la qualité de l’air, en particulier dans les ports et les zones côtières. Les oxydes de soufre (SOx) qui proviennent du carburant marin provoquent des pluies acides et des impacts sur la santé humaine, comme des problèmes respiratoires.
- Les rejets dans l’eau : en plus de tout ça, les ferries peuvent rejeter des eaux usées, des huiles ou même des déchets plastiques en mer. Le nettoyage des cuves et les rejets accidentels de fioul polluent également les écosystèmes marins.
- La pollution sonore : parmi les sources de pollution, l’environnement « direct » n’est pas le seul à être touché. En effet, les vibrations et le bruit des moteurs peuvent perturber la faune marine et notamment les cétacés. D’ailleurs, dans la Méditerranée, les collisions avec les navires sont la principale cause de mortalité due à l’activité humaine pour les baleines2 !
Si on résume, les ferries traditionnels sont effectivement polluants. Cependant, la bonne nouvelle, c’est que des innovations technologiques et des réglementations strictes permettent de réduire leur impact environnemental. Mais on vous en parle un peu plus loin dans cet article 😉.
Quelle empreinte carbone pour le ferry ?
Si on en croit l’Agence européenne de l’environnement, le transport en ferry émettrait en moyenne 60 g de CO2 par kilomètre et par passager3. Selon d’autres organismes, il faudrait compter en moyenne (par passager-kilomètre) entre 0,12 kg et 0,396 kg, selon la vitesse et le type de ferry4. Pour résumer, les calculs sont complexes et, là encore, dépendent de différents facteurs, comme :
- Le type de ferry : les ferries plus anciens ou utilisant des carburants lourds émettent généralement plus de CO₂ que les modèles récents équipés de technologies plus propres.
- La vitesse de navigation : une vitesse plus élevée entraîne une consommation de carburant accrue et donc, fait grimper les émissions par passager-kilomètre.
- La capacité et le taux d’occupation : un ferry transportant plus de passagers ou de véhicules répartit ses émissions sur un plus grand nombre d’usagers, ce qui réduit forcément l’empreinte carbone par personne.
Par ailleurs, le média écolo Bon Pote a tenté la prouesse de développer un simulateur, afin d’obtenir l’empreinte carbone d’un trajet en ferry en quelques clics. Seulement, ce faisant, le spécialiste de l’environnement pointe le « manque de transparence des entreprises propriétaires de ferries » et précise que s’il existe des obligations légales (françaises et européennes), celles-ci sont « loin d’être assez précises et solides ». À croire qu’avec le ferry, pas d’autre choix que de se contenter d’approximations.
Comme chez Deklic, on est vraiment sympas, on a décidé de vous mâcher un peu le travail, en recherchant le bilan carbone des différents trajets réalisés par les ferrys disponibles sur le territoire hexagonal, en fonction de votre destination. Et voici les résultats…
Destination | Traversée en ferry | Bilan carbone |
Algérie | Marseille – Alger | 156 kg CO2e |
Algérie | Marseille – Béjaïa | 142 kg CO2e |
Algérie | Marseille – Oran | 357 kg CO2e |
Algérie | Marseille – Skikda | 141 kg CO2e |
Angleterre | Caen – Portsmouth | 51 kg CO2e |
Angleterre | Cherbourg – Poole | 20 kg CO2e |
Angleterre | Cherbourg – Portsmouth | 25 kg CO2e |
Angleterre | Le Havre – Portsmouth | 37 kg CO2e |
Angleterre | Calais – Douvres | 5,7 kg CO2e |
Angleterre | Dieppe – Newhaven | 14 kg CO2e |
Angleterre | Dunkerque – Douvres | 3,3 kg CO2e |
Angleterre | Calais – Folkestone | 9,1 kg CO2e |
Angleterre | Roscoff – Plymouth | 48 kg CO2e |
Angleterre | Saint-Malo – Portsmouth | 119 kg CO2e |
Corse | Nice – Ajaccio | 96 kg CO2e |
Corse | Nice – Bastia | 71 kg CO2e |
Corse | Nice – Île-Rousse | 46 kg CO2e |
Corse | Nice – Porto-Vecchio | 183 kg CO2e |
Corse | Toulon – Ajaccio | 147 kg CO2e |
Corse | Toulon – Porto-Vecchio | 266 kg CO2e |
Corse | Toulon – Île-Rousse | 124 kg CO2e |
Corse | Toulon – Bastia | 192 kg CO2e |
Corse | Marseille – Ajaccio | 244 kg CO2e |
Corse | Marseille – Bastia | 302 kg CO2e |
Corse | Marseille – Île-Rousse | 209 kg CO2e |
Corse | Marseille – Porto-Vecchio | 405 kg CO2e |
Corse | Marseille – Propriano | 312 kg CO2e |
Irlande | Cherbourg – Rosslare | 153 kg CO2e |
Irlande | Roscoff – Cork | 173 kg CO2e |
Irlande | Roscoff – Rosslare | 128 kg CO2e |
Irlande | Cherbourg – Dublin | 249 kg CO2e |
Majorque | Toulon – Alcudia | 131 kg CO2e |
Maroc | Sète – Nador | 361 kg CO2e |
Maroc | Sète – Tanger | 597 kg CO2e |
Sicile | Nice – Trapani | 169 kg CO2e |
Sicile | Toulon – Trapani | 185 kg CO2e |
Tunisie | Marseille – Tunis | 211 kg CO2e |
*Les résultats obtenus sont issus du simulateur d’empreinte carbone du média Bon Pote et ne tiennent pas compte des bagages ou véhicules éventuels.
Empreinte carbone d’un ferry VS empreinte carbone d’un avion Pour déterminer lequel du ferry ou de l’avion sort grand vainqueur du match, nous avons tenté une petite simulation via l’outil MyClimate. Il apparaît que pour un vol entre Marseille et l’aéroport Houari Boumediene d’Alger, il faut compter un bilan carbone équivalant à 229 kg CO2e, tandis qu’un voyage en ferry (pour la même destination) représente quant à lui « seulement » 156 kg CO2e. C’est donc presque deux fois moins. Grand vainqueur : le ferry ! |
Ferries moins polluants : des progrès notables
Bon, si on résume, le ferry n’est pas le mode de transport le moins polluant. Il reste cependant et sans conteste plus « clean » que son homologue aérien. Eh oui, entre ferry et avion, y’a pas photo. D’autant que, comme le souligne une porte-parole de l’ONG européenne Transport & environment, spécialisée dans les mobilités, leur « verdissement » semble plus probable que celui de l’aviation. « À l’avenir, les ferries utiliseront des modes beaucoup plus propres pour naviguer. Les distances parcourues étant relativement courtes ou moyennes et les routes empruntées restant les mêmes, il leur sera facile d’adopter la propulsion électrique ou à hydrogène en rechargeant leurs navires une fois à quai », précise-t-elle.
D’ailleurs, en Norvège, des ferries entièrement électriques, comme le MS Ampere, naviguent déjà sur de courtes distances (entre Lavik et Oppedal). Alimentés par des batteries rechargeables, ils fonctionnent sans émissions directes de CO₂. De quoi envisager un avenir plutôt encourageant pour ces pourfendeurs des mers. Les ferries à hydrogène, encore en phase de développement, pourraient également offrir une solution zéro émission.
Bon, on ne va pas se le cacher, malgré ces avancées, les ferries restent gourmands en énergie, surtout sur les longues distances ou lorsqu’ils transportent des véhicules. Les alternatives plus vertes ne sont pas encore généralisées et se concentrent sur les trajets courts. Alors, en attendant, pour les voyageur·se·s soucieux·ses de réduire leur empreinte carbone, d’autres options sont souvent préférables :
- Le train : alimenté en grande partie par des énergies renouvelables dans plusieurs pays européens, le train est le mode de transport longue distance le moins polluant. Selon l’Agence Européenne pour l’Environnement, un voyage en train émet en moyenne 6 g de CO₂ par passager-kilomètre, contre 120 g pour un ferry classique.
- Le bus : avec des émissions d’environ 27 g de CO₂ par passager-kilomètre, le bus est une alternative intéressante pour les trajets terrestres, notamment lorsque le train n’est pas une option.
- Le covoiturage : si l’on doit voyager en voiture, partager son trajet via des plateformes comme BlaBlaCar permet de diviser l’impact carbone par le nombre de passagers.
Il ne vous reste désormais plus qu’à vous mettre en route (sur terre ou par la mer) et nous, on vous souhaite bon voyage !
1Direct Ferries – Ferry vers la France
2GEO – La collision avec les navires, première cause de mortalité pour les baleines en Méditerranée
3EEA – Rail and waterborne — best for low-carbon motorised transport
4Lipasto – Unit emissions of ferries and Ropax
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