Week-end de mobilisation contre l’A69 : retour sur un choc de forces et d’idées !

Par Gaëlle Coudert , le 23 octobre 2023 — Protection de l’environnement - 6 minutes de lecture
Manifestation A69

Crédit photo : Alain Pitton/NurPhoto via AFP)

Dans le dossier de l’A69, le week-end de mobilisation contre le projet a été fort en rebondissements. On fait le point sur l’essentiel à retenir en ce début de semaine.

Une tentative de ZAD stoppée par les forces de l’ordre 

Dimanche 22 octobre 2023, dans l’après-midi, les opposants à l’A69 qui avaient tenté de créer une ZAD (Zone à Défendre) dans le Tarn ont été délogés par les forces de l’ordre. La veille, une centaine de personnes avaient investi un groupe de « maisons de maître expropriées par le chantier » situées sur le lieu-dit de la Crémade à Saïx, à une dizaine de kilomètres à l’est de Castres, près du tracé de la future autoroute. L’objectif était de protester contre le projet et créer une ZAD, à l’image de ce qui avait été organisé contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes près de Nantes. Selon l’AFP, la zone concernée était totalement sous contrôle des forces de l’ordre dimanche en fin de journée, et les derniers manifestants se dispersaient.

Après avoir investi les lieux occupés par les anti-A69 à la mi-journée, les gendarmes mobiles, soutenus par deux véhicules blindés et plusieurs poids lourds, ont ainsi installé de hautes barrières grillagées pour empêcher les manifestants de revenir sur le site de quelques bâtisses où ils avaient commencé à prendre place depuis la veille. En début d’après-midi, repoussés sur une prairie voisine, les manifestants 
ont continué à faire face aux forces de l’ordre qui ont fait usage de lacrymogènes et de grenades de désencerclement pour les éloigner. 

Dimanche les militants opposés à l’A69 ont été expulsés par les forces de l’ordre pour empêcher l’installation d’une ZAD, Crédit photo : Antoine Berlioz/Hans Lucas

Avant de quitter les lieux, plusieurs militants ont formé au sol avec des troncs d’arbre, des douilles de grenades lacrymogènes puis avec leurs corps allongés le logo des Soulèvements de la Terre, avant de nettoyer le site. En fin d’après-midi, il ne restait plus qu’environ 70 personnes sur l’ensemble du site de la mobilisation, a indiqué le préfet du Tarn, Michel Vilbois, lors d’un point de presse. « L’objectif est atteint c’est-à-dire pas d’installation de ZAD sur ce territoire », s’est félicité le préfet, qui avait mobilisé 1200 gendarmes sur le site dont 600 pour l’opération d’évacuation. Au cours de l’intervention, « neuf personnes ont été appréhendées et remises à la justice », a-t-il déclaré, ajoutant que « six gendarmes ou policiers ont été blessés dans l’opération ». Les organisateurs ont fait état de leur côté d’une trentaine de blessés légers et de plusieurs interpellations.

Une large manifestation contre le projet d’A69

La veille, samedi 21 octobre, des milliers de manifestants ont marché dans le Tarn, majoritairement dans le calme, pour s’opposer à l’autoroute A69 Toulouse-Castres et scander « Non au Macadam ». Plus de 10 000 personnes étaient présentes, selon les organisateurs, tandis que la préfecture a fait état d’un cortège principal de 2400 manifestants, et de « 2500 individus radicaux et violents ». 

Près de 10 000 personnes, selon les organisateurs, ont manifesté le 21 octobre 2023 contre l’autoroute A69, Crédit photo : Patrick Batard/Hans Lucas via AFP

La majorité des manifestants ont défilé calmement, le cortège principal marchant sur la route, derrière des tracteurs de la Confédération paysanne, tandis qu’un autre groupe de plusieurs centaines de personnes a choisi un moment d’emprunter la voie ferrée, avant de rejoindre le premier défilé. Côte à côte, au détour des différents cortèges, marchaient des anciens mobilisés du plateau du Larzac avec des militants plus jeunes, les banderoles et pancartes multipliant les jeux de mots : « Faites des 69, pas l’A69 », « L’A69 finira en cul de sac », « Des prairies, pas des Ferrari » ou encore « Plus de légumes, moins de bitume ».  

« Jamais il n’y a eu une telle empathie pour notre lutte », se félicitait Gilles Garric du collectif La Voie est libre, qui avec d’autres associations et syndicats (Extinction Rebellion, les Soulèvements de la Terre, Groupement national de surveillance des arbres, Confédération Paysanne, Solidaires, etc.) ont organisé le rassemblement.

Un groupe de personnes s’est détaché du défilé « presque tous cagoulés, vêtus de noir, casqués », selon un communiqué de la préfecture, puis ont endommagé des biens et dégradé des bâtiments de sous-traitants du concessionnaire Atosca, en charge du chantier de l’A69. Sept interpellations auraient eu lieu à la suite de ces dégradations.

Des opposants aussi parmi les politiques

Vendredi 20 octobre 2023, dans une interview à Mediapart, Olivier Faure, le patron du parti socialiste appelait à renoncer au projet de l’A69 qu’il juge « socialement injuste, écologiquement absurde », à rebours de la position de la présidente PS de la région Occitanie, Carole Delga. 

Alors que le gouvernement s’est dit décidé à mener le projet à son terme malgré l’opposition d’écologistes et de scientifiques, Olivier Faure considère que ce projet « né au début du siècle, avant une réelle prise de conscience écologique, apparaît aujourd’hui très anachronique ». « On est dans un projet écologiquement contesté et contestable, et socialement injuste puisque ce serait la deuxième autoroute la plus chère de France », remarque-t-il, avec « un aller-retour qui coûtera 17 euros », pour une portion de 53 km.

« Le socialisme s’est longtemps confondu avec le productivisme. Mais ça, c’était avant. Notre projet aujourd’hui, c’est le socialisme écologique », argumente-t-il, expliquant que « la vie meilleure que nous réclamons pour tous ne peut passer par la dégradation des conditions d’existence liée à la perte de biodiversité et au réchauffement climatique ». 

(Avec AFP)

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Gaëlle Coudert

Ancienne avocate parisienne reconvertie en journaliste basée dans les Pyrénées-Atlantiques, Gaëlle s’est spécialisée sur les sujets liés à l'écologie. Elle a cofondé le magazine basque Horizon(s), a été rédactrice en chef d'ID, l’Info Durable et rédige aujourd’hui des articles pour divers médias engagés dont Deklic. Ses passions : le sport (surf, yoga, randonnée) et la musique (guitariste et chanteuse du groupe Txango)

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