Les JO-2024 encore loin d’être écologiques, selon Carbon Market Watch
Des efforts « convenables » mais encore « insuffisants » : à près de 100 jours du coup d’envoi des Jeux olympiques, l’impact de Paris-2024 sur la planète est « trop important » pour que les Jeux puissent être écologiquement « durables », estime l’ONG Carbon Market Watch qui appelle à une réforme « radicale ».
À l’origine, le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojo) promettait des Jeux de Paris « à contribution neutre pour le climat », c’est-à-dire sans émission nette de gaz à effet de serre. Mais face aux critiques, la communication a changé et évoque une pollution carbone moitié moindre que lors des précédentes olympiades.
« Nous sommes vraiment très heureux que Paris-2024 (…) ait renoncé » à son affirmation initiale, affirme auprès de l’AFP Benja Faecks, experte du Carbon Market Watch, et « nous saluons le fait qu’ils ont établi un budget carbone avant l’événement », malgré des doutes sur la « légitimité » du calcul affiché.
Paris-2024 prévoit l’émission de quelque 1,58 million de tonnes équivalent CO2, soit moins de la moitié des 3,5 millions de tonnes en moyenne des Jeux de Londres (2012) et Rio (2016). Mais l’objectif « semble à première vue ambitieux » et « difficile à vérifier », met en garde l’ONG.
Pour elle, la stratégie climatique des organisateurs demeure « incomplète » et « manque de transparence » : « aucune méthodologie ou précision quant au mode de calcul n’a été dévoilée », explique l’organisation dans un rapport.
Les organisateurs « méritent d’être salués » pour leur tentative de rendre plus vert un évènement d’une telle envergure, mais « en dépit d’améliorations marginales », l’empreinte carbone des Jeux « demeure trop élevée pour être soutenable ». C’est « encourageant » mais « il faut faire plus », résume Gilles Dufrasne, l’un des responsables de Carbon Market Watch.
Transports aériens
Par secteurs, Carbon Market Watch prévoit que les principales émissions de gaz à effet de serre proviendront des transports (environ 40 %) et de la construction (32 %). Le reste se répartit entre la nourriture (1 %), les achats non-alimentaires, type « goodies » (20 %), et la consommation d’énergie (8 %).
De son côté, le Cojo estime que les émissions se déclineront en trois tiers : un pour les déplacements (et 25 % du total pour les seuls voyages des spectateurs), un autre pour les constructions (dont 25 % pour celles permanentes) et un dernier pour les opérations des Jeux (hébergement, sécurité, restauration, etc). Des « efforts » ont été faits pour limiter les émissions sur la construction – 95 % des infrastructures sont déjà existantes ou temporaires – ou grâce aux menus végétariens, mais « les organisateurs ont les mains liées lorsqu’il s’agit de s’attaquer aux plus grandes sources d’émissions », note le rapport. C’est le cas pour le transport aérien des sportifs et des spectateurs, dont les émissions, en l’état actuel, « ne peuvent pas être réduites de manière significative ».
Refonte radicale
Carbon Market Watch souligne aussi des « incohérences », notamment dans le choix des sponsors : « l’absence de critères climatiques » imposés aux partenaires « est une occasion manquée (…) pour influencer les grandes entreprises ».
Enfin, l’ONG juge « opaques » les promesses des organisateurs de compenser les émissions inévitables par des crédits carbone. Le recours à ce mécanisme « est problématique dans tous les cas », estime Mme Faecks : car d’une part cela suppose de s’autoriser « à dépasser les limites » et d’autre part parce que les « crédits carbone de haute qualité manquent ».
Peut-on encore organiser des Jeux à l’heure du réchauffement climatique mondial ? « Il est clair que des JO ne peuvent être véritablement compatibles avec le respect de la barrière de 1,5 degré de réchauffement », objectif le plus ambitieux des accords de Paris, « à moins de repenser radicalement » leur organisation, estime Carbon Market Watch.
Plutôt que de faire converger athlètes et spectateurs du monde entier dans un même lieu, l’ONG suggère que pour chaque discipline la compétition ait lieu dans une ville différente avec accès réservé aux populations locales : l’athlétisme à Mexico, les sports aquatiques à Buenos Aires, les sports de combat à Séoul, le cyclisme à Ankara… En plus de réduire le bilan carbone, « l’autre avantage serait d’augmenter l’accessibilité des Jeux », visibles sur place par davantage de personnes, fait valoir Carbon Market Watch.
(Avec AFP)
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