L’interview écolo de Florent Peyre : « Je me lave aussi à l’eau froide. Croyez-moi, ça accélère considérablement le rythme de la douche »

Par Joséphine Simon-Michel , le 11 août 2023 — interview - 8 minutes de lecture
Florent Peyre sur scène, Crédit SYSPEO/SIPA

Florent Peyre sur scène, Crédit SYSPEO/SIPA

L’humoriste ne plaisante pas en matière d’écologie. Enfant de la campagne, il a toujours été sensible à son environnement et grâce au livre Deux degrés de trop de Yann Arthus-Bertrand, il a considérablement changé son mode de consommation.

Êtes-vous éco-anxieux ?

Je ne peux pas me qualifier d’éco-anxieux mais je suis très sensible à tous les dérèglements environnementaux et au réchauffement climatique. J’ai connu une période d’angoisse en lisant le livre Petit manuel de résistance contemporaine de Cyril Dion. Au quatrième chapitre, j’ai ressenti des sueurs froides à tel point que je pensais ne jamais pouvoir finir le livre. Ça m’a assommé. Après, je me suis raisonné en réalisant que j’agissais déjà dans mes gestes au quotidien.

Êtes-vous dans la culpabilité en tant que consommateur ?

Ça ne sert à rien de s’autoflageller en se disant que l’on ne fait pas assez. Chacun agit à sa manière. De mon côté, je suis tranquille avec moi-même. Depuis dix ans, avec ma femme et mon fils, nous avons changé notre manière de consommer, particulièrement l’alimentation. On a presque arrêté de manger de la viande, banni les protéines animales et on achète tout en vrac. On choisit des fruits et légumes de saison et de préférence, cultivés à moins de 100 kilomètres de Paris. J’avoue que ce n’est pas toujours très drôle car l’hiver, ça fait beaucoup de pommes de terre et de potirons. Il n’y a plus aucun emballage chez nous et on cuisine tout nous-même. Notre consommation est réduite. Et puis j’ai la chance de ne pas être intéressé par les fringues et les voitures. Ainsi, je ne le vis pas comme une privation.

Qu’est-ce qui vous a donné le deklic green ?

J’ai toujours été très sensible à la nature. J’ai grandi à la campagne en Ardèche. Jusqu’à mes 15 ans, je passais mes journées dans la forêt. Après, je suis parti en sport-étude au bord de la mer. Ce ne sont pas mes parents qui m’ont transmis cette sensibilité car ils ne font pas partie de cette génération écolo. C’est plutôt moi qui leur ai appris à faire attention.

Mais le vrai déclic est venu après la lecture du livre Deux degrés de trop de Yann Arthus-Bertrand. Il m’a fait prendre conscience de l’interconnexion sur la planète. Quand on mange un morceau de viande en France, on participe à la déforestation de l’Amazonie. A partir de ce livre, je me suis mis à agir de plus en plus.

Quels sont vos gestes simples ?

En tournée, je me déplace en train. Il faut vraiment que je sois dos au mur pour prendre l’avion en France. Je me lave aussi à l’eau froide. Croyez-moi, ça accélère considérablement le rythme de la douche. À une époque, je récupérais l’eau froide qu’on laisse couler le temps d’avoir de l’eau chaude pour faire cuire les pâtes. Mais on m’a dit que ce n’était pas très sain car l’eau avait stagné dans le chauffe-eau.

Quel est LE mot écologique du moment et pourquoi ? 

La décroissance. Il faut limiter la surconsommation. On vit très bien avec le minimum.

Comment vous déplacez-vous ? 

Je me déplace exclusivement à vélo dans Paris. Ma femme aussi et notre fils est en train d’apprendre à pédaler.

C’est quoi pour vous être écolo ?

C’est être conscient qu’il est nécessaire de changer nos modes de fonctionnement. Je ne suis pas pour la culpabilisation. Il faut continuer à vivre tout en restant conscient de la réalité. Par exemple, il suffit juste que chaque individu réduise sa consommation de viande à moitié. Imaginez : ce serait comme si la moitié de la France était devenue végétarienne ! C ‘est pareil à l’échelle du monde ! Nous ne sommes pas obligés d’arrêter de consommer de la viande. On doit changer progressivement sans se faire souffrir.
Il y a aussi une belle satisfaction de réaliser que l’on agit pour le bien de la nature ou de l’avenir de nos enfants.

Quelles sont les remarques les plus absurdes et récurrentes que vous entendez autour de vous sur l’écologie ?

Ce sont davantage les réactions des autres quand ils découvrent que je suis concerné par l’écologie. D’abord, il y a un petit rictus moqueur de leur part, puis après, ils lancent « Et la batterie de ton vélo, tu crois que c’est écolo ? » C’est tellement nul… Je ne me laisse pas marcher dessus et je sais quoi leur répondre, sans m’énerver : « C’est mieux de rouler à vélo qu’en grosse voiture avec une grosse batterie et un gros moteur. »

Que faites-vous pour tenter de sensibiliser nos citoyens ?

J’en parle beaucoup autour de moi, j’en ai même fait un spectacle. Ça ne traite pas exclusivement de l’écologie mais ça raconte l’histoire d’une troupe de comédie musicale un soir de première avec comme thème, cette idéologie de vouloir changer le monde. Ça me permet de glisser quelques conseils écologiques sans être moralisateur. J’avoue que les spectateurs repartent avec une autre idée sur l’écologie.

Et puis avec des interviews telles que la vôtre, j’espère faire prendre conscience aux internautes qui me liront de l’importance d’agir à leur échelle.

Comment expliquez-vous qu’encore autant d’êtres humains ne se sentent pas concernés par l’avenir de notre planète ?

Parce qu’ils ne voient pas le danger. Ce n’est pas concret pour eux, bien qu’avec les canicules, les sécheresses, ils vont peut-être enfin réaliser l’ampleur des dégâts, du moins, je l’espère. Beaucoup de citoyens ne se sentent pas concernés par la fonte des glaces et la disparition des ours polaires. Ça ne se passe pas dans leur jardin donc pourquoi s’en inquiéter ? Le jour où il n’y aura plus d’eau en tournant le robinet, ça deviendra problématique pour eux. Mais j’ai bon espoir en l’humanité.

Quels sont les écologistes ou personnalités qui vous ont inspiré ?

Cyril Dion, Hugo Clément, Camille Etienne et Leonardo Di Caprio qui est mon idole au cinéma et que je trouve toujours très intelligent dans ses prises de parole à ce sujet.

Selon vous, où en serons-nous dans 50 ans ?

Je suis très optimiste. L’humanité a sa capacité d’intelligence qui lui permet de s’adapter à toutes les situations. Mon fils de six ans et demi a déjà les automatismes et comprend tout ce qu’on lui raconte, tout en faisant attention à ne pas trop lui véhiculer d’anxiété. Il ne faut pas se sentir coupable sur tout. Nous ne sommes pas les uniques responsables. Faisons du mieux que l’on peut.

Comment faire pour que votre métier soit plus écolo ?

Le monde du spectacle, de la télé et du cinéma n’est pas le plus écolo, mais il y a des collectifs de production qui s’organisent pour faire des films avec un impact écologique moindre. Il y a de plus en plus un poste dédié à « l’éco production ». C’est une personne qui est chargée de faire le bilan énergétique à l’issue d’un tournage. Sur la gestion de mon one-man show, on essaie d’utiliser des ampoules Led au maximum. J’ai fait supprimer les bouteilles en plastique dans mes loges et on est tous avec nos gourdes.

Pour aller plus loin :

🎤 L’interview écolo de Thomas Dutronc : « Le plastique et tous les gadgets inutiles m’exaspèrent »

🎤 L’interview écolo de Gil Alma : « Je suis devenu végétarien il y a 10 ans »

🎤 L’interview écolo de Philippe Vandel : « Être écolo, c’est agir local, penser global »

🎤 L’interview écolo de Tatiana Silva : « Je tente, à travers mes bulletins, de conscientiser les téléspectateurs sur le changement climatique »

Joséphine Simon-Michel

Journaliste infotainment, Joséphine excelle dans l'art des interviews. Pour Deklic, elle interroge des personnalités de différents univers (cinéma, télé, humour, politique…), toutes engagées pour la protection de l’environnement et conscients que la transition écologique est l’affaire de tous.

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