Nucléaire : la facture prévisionnelle des futurs EPR en hausse, associations et gouvernement réagissent
Selon une information du journal Les Echos dévoilée lundi 4 mars, le coût prévisionnel du programme de construction des six premiers réacteurs commandés par l’État à EDF est désormais évalué à 67,4 milliards, soit une hausse de 30% par rapport à la première estimation. Alors que les associations environnementales se crispent, Bruno Le Maire appelle l’énergéticien public à « tenir ses coûts ».
La relance de l’atome en France voit sa facture exploser. Le groupe EDF évalue à 67,4 milliards d’euros la construction des six futurs réacteurs pressurisés européens (EPR) prévus à Penly, Gravelines et au Bugey, au lieu des 51,7 milliards initialement annoncés en février 2022. Selon Les Echos, ce nouveau chiffrage « intègre les coûts d’investissement pour la réalisation des études d’ingénierie, les contrats de fabrication des équipements et de construction sur le site, les provisions pour risques, les frais de mise en service, de pièces de rechange ou encore les charges de long terme pour démantèlement ».
Hausse des coûts d’ingénierie et de construction
Deux raisons principales sont avancées par EDF pour justifier la révision du premier budget, explique le journal. D’abord « la progression des coûts d’ingénierie, l’énergéticien ayant décidé de prendre neuf mois de plus que prévu pour finaliser les plans génériques de son réacteur EPR remodelé ; et puis « la hausse des coûts de construction, qui résulte des premiers appels d’offres lancés par EDF pour anticiper la fabrication de certaines pièces critiques ou sécuriser des contrats clés », laquelle pèserait particulièrement lourd dans la balance.
En parallèle, l’EPR de Flamanville – attendu cette année avec douze ans de retard – se chiffre désormais à 13,2 milliards d’euros, selon EDF. C’est quatre fois le budget initial de 3,3 milliards d’euros. La France n’est pas la seule concernée par cette flambée des coûts. En Angleterre, la facture du projet d’EPR de la centrale d’Hinkley Point a plus que doublé en janvier, atteignant désormais entre 41,6 et 46,5 milliards en livres courantes dans un scénario de base, au lieu des 18 milliards estimés au lancement du projet en 2016.
« L’obstination » du gouvernement
L’information de l’augmentation des coûts a fait bondir des associations environnementales qui dénoncent le choix coûteux de l’État de recourir à un programme ambitieux de nouveaux réacteurs dont le premier à Penly n’est pas attendu avant 2035-2037, au détriment selon elles des énergies renouvelables, déployables plus rapidement.
« En s’obstinant à relancer une industrie trop chère et trop lente face à l’urgence climatique, le gouvernement français sabote délibérément la transition énergétique », a notamment dénoncé Pauline Boyer, chargée de campagne Transition énergétique pour Greenpeace France, citée dans un communiqué. « Le gouvernement s’obstine à relancer cette industrie, au détriment des énergies renouvelables et d’une réelle politique de sobriété énergétique », a renchéri le Réseau sortir du nucléaire.
« Les coûts du nucléaire s’envolent, et cela depuis longtemps », a aussi commenté l’association en rappelant les précédents déboires des EPR d’EDF en France et à l’étranger, ses dérapages de coûts et de calendrier. Redoutant une augmentation très significative de la facture des clients d’EDF, Agir pour l’Environnement appelle « solennellement les pouvoirs publics à stopper cette folie des grandeurs ».
« EDF doit tenir ses délais et ses coûts »
Alors qu’était attendue sa réaction, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a commenté ce nouveau chiffrage dans les colonnes du Monde ce mercredi 6 mars. « EDF doit apprendre à tenir ses coûts et son calendrier. Le président de la République a annoncé la réalisation de six nouveaux EPR, EDF doit relever ce défi dans les délais et dans les coûts impartis », a-t-il déclaré.
« Il s’agit de construire une série de réacteurs dont le premier exemplaire sera l’EPR de Penly [Seine-Maritime]. Cela veut dire des économies d’échelle. Je participerai au prochain comité exécutif d’EDF, fin mars, avec un message simple : EDF doit tenir ses délais et ses coûts », a-t-il encore prévenu.
Lesté d’une dette abyssale de 54,4 milliards d’euros, le groupe EDF n’a pas souhaité faire de commentaire, se contentant de répondre que ce budget pourrait évoluer. « Nous sommes actuellement dans une phase d’optimisation des coûts et du planning », avait indiqué lundi 4 mars le groupe détenu à 100% par l’État. Jusqu’ici, le gouvernement n’a pas arrêté les modalités de financement du nouveau programme nucléaire qui prévoit jusqu’à quatorze réacteurs.
(Avec AFP)
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