Pesticides : les distances de sécurité autour des parcelles traitées ne suffisent pas à protéger les populations

Par Charlotte Combret , le 19 janvier 2024 - 4 minutes de lecture
énérations futures demande des ZNT d’au moins 150 mètres

énérations futures demande des ZNT d’au moins 150 mètres. Crédit : Igor Stevanovic / Science Photo Library / AFP 

Même des dizaines de mètres d’éloignement de la limite avec les surfaces agricoles traitées ne réduisent pas significativement les concentrations de pesticides dans l’air. C’est ce que révèle le dernier rapport de l’association Générations futures, publié le 16 janvier 2024. Les zones de non-traitement actuelles sont ainsi jugées insuffisantes pour protéger les riverains.

« Riverains exposés aux pesticides : même à 70 m, la protection est loin d’être assurée ! » prévient l’ONG sur X. Dans son nouveau rapport, Générations futures révèle que des distances de plusieurs dizaines de mètres en zone agricole ne protègent pas suffisamment contre l’exposition aérienne aux pesticides. Depuis 2019, les agriculteurs doivent respecter des zones de non-traitement (ZNT) par des pesticides chimiques, péniblement instaurées par le gouvernement. Si elles varient selon la nature du produit, dans la plupart des cas, les distances de sécurité en vigueur sont comprises entre 5 et 10 mètres. Alors que Générations futures militait jusqu’ici pour une ZNT à 70 ou 100 mètres, l’association préconise désormais « au moins 150 mètres ». 

« Jusqu’à 35 substances différentes »

Après des premières analyses de l’air réalisées en 2021 et 2022, les résultats de cette troisième campagne tombent comme un couperet. En sept semaines, les riverains des zones traitées par des pesticides sont exposés à des cocktails de nombreux pesticides. « Jusqu’à 35 substances différentes », précise l’association. Certaines d’entre elles sont en outre particulièrement préoccupantes, comme c’est le cas pour le glyphosate, classé cancérogène probable, particulièrement présent dans le Nord. D’autres pesticides dangereux selon la classification de l’UE ont également été détectés par l’association, soulignant « la nécessité de retirer du marché les produits comportant des substances CMR (Cancérogènes, Mutagènes ou Reprotoxiques) ou perturbatrices endocriniennes », insiste Générations futures. 

Pour parvenir à ces résultats, les équipes se sont rendues dans le Nord, la Gironde et le Rhône. Elles ont placé des capteurs – cinq par parcelle testée – dans des bourgs situés à proximité de zones agricoles, ainsi que dans des parcelles privées entourées de parcelles traitées avec des produits phytosanitaires. Par rapport aux campagnes précédemment menées, l’ONG dit avoir amélioré son protocole, en utilisant notamment des capteurs plus performants pour fixer des pesticides. L’objectif était « à la fois d’objectiver la situation d’exposition aux pesticides des riverains vivant à proximité immédiate des cultures et d’étudier les effets d’un éloignement de l’ordre de quelques dizaines de mètres de cette proximité immédiate sur les concentrations de pesticides dans l’air » explique Générations futures.

Des ZNT inefficaces

Pour l’association, les résultats sont sans équivoque : « même à plusieurs dizaines de mètres des zones de pulvérisation, les quantités de pesticides dans l’air restent élevées ». « Afin de protéger les populations il est donc urgent que le gouvernement renforce les textes en vigueur pour augmenter largement les zones non traitées actuelles de 5 à 10 mètres, qui apparaissent totalement inefficaces ! » alerte François Veillerette, porte-parole de Générations Futures dans un communiqué. Alors que la nouvelle stratégie Ecophyto doit être publiée prochainement, « on espère que le gouvernement actuel saura prendre les mesures qui s’imposent sur ce sujet de santé publique qui concerne un grand nombre de nos concitoyen.nes. Dans le cas contraire, nous saurons agir en conséquence » conclut-il.

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Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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