Pollution aux granulés plastiques : le littoral atlantique français guette les « larmes de sirène »

Par Charlotte Combret , le 18 janvier 2024 - 4 minutes de lecture
Des « larmes de sirènes »

Des « larmes de sirènes ». Crédit : Fred Tanneau / AFP

Depuis mi-décembre, des millions de petites billes blanches, tombées d’un immense navire marchand, déferlent sur les plages du nord-ouest de l’Espagne. Ces granulés de plastique, aussi appelés « pellets » ou « larmes de sirène » se déplacent désormais vers l’est du golfe de Gascogne. Le Pays Basque et les Landes restent en alerte.

Les « larmes de sirène » coulent dans les fonds marins et ce sont les défenseurs de l’océan qui pleurent. Avec des passoires ou des tamis, des bénévoles tentent depuis des jours de ramasser des millions de microbilles de plastique, échouées sur des plages de Galice et des Asturies au nord-ouest de l’Espagne. 26 tonnes de Granulés Plastiques Industriels (GPI) ont été perdues dans l’océan depuis la chute en mer, le 8 décembre dernier, de six conteneurs tombés d’un bateau de 300 mètres à proximité de la frontière ibérique. Ces granulés de plastique étaient notamment destinés à la production de bouteilles. En Galice, des actions de « nettoyage citoyen » sont impulsées par des organisations locales, à l’image d’Écologistes en action. Mais la tâche est rude. La taille de « ces petites billes de cinq millimètres de diamètre les rendent très difficiles à récupérer une fois mélangées au sable », a indiqué l’ONG auprès d’AFP.

La marée blanche met le cap vers l’Est

La marée blanche de plastique pourrait-elle arriver sur la côte atlantique française ? Possible. Portée par les vents et les courants, cette pollution se déplace désormais vers l’est du golfe de Gascogne. Depuis dimanche 14 janvier, la préfecture maritime de l’Atlantique veille au grain. « Après avoir touché les plages de Galice, de Cantabrie, puis du Pays Basque espagnol, cette pollution pourrait toucher les côtes françaises et les plages du sud-ouest et en particulier des Pyrénées-Atlantiques dans les prochaines heures ou prochains jours » prévenait-elle dans un communiqué. Mais l’avenir de ces « larmes de sirène » est à ce jour incertain. « Il est difficile d’anticiper avec précision le lieu et la date éventuelle d’arrivée de cette pollution sur les côtes françaises, le suivi par moyens satellites et aériens, ainsi que les différentes méthodes de calculs de dérives, se révélant inadaptés pour ce type de pollution ». 

Un fléau pour la biodiversité

Où qu’elles soient, ces « marées blanches » ont un impact considérable sur les espèces et les habitats marins et terrestres. Une fois ces granulés déversés dans l’environnement, ils y restent pour des centaines, voire des milliers d’années, sans jamais se biodégrader. « Les pellets peuvent être avalés par les animaux, qui les confondent avec des œufs de poissons, ce qui bouche leur estomac et cause souvent leur mort. Ils se fractionnent et intègrent progressivement la chaîne alimentaire, jusqu’aux poissons que nous mangeons, présentant un risque potentiel pour la santé humaine » explique en ligne l’ONG Surfrider Foundation, particulièrement engagée sur le dossier. En outre, ces microplastiques agissent « comme des ‘éponges’ à produits toxiques et bactéries se trouvant dans l’environnement marin qui s’ajoutent aux additifs déjà nocifs contenus dans les granulés, accroissant encore leur toxicité » souligne l’association.  

160 000 tonnes de microplastiques perdus chaque année

Matériau-clé permettant, après avoir été fondus, de produire des composants et objets en plastique, des dizaines de tonnes de « pellets » s’échappent chaque année dans la nature en raison de mauvaises manipulations tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Ce sont près de 160 000 tonnes de granulés plastiques qui sont « perdus » chaque année sur le Vieux Continent, d’après les estimations d’un rapport commandé par la Commission européenne en 2018. En octobre dernier, Bruxelles avait proposé une législation visant à endiguer la pollution liée aux fuites de granulés de plastique, omniprésents dans l’industrie, en obligeant les grandes entreprises qui les manipulent à renforcer leurs mesures de prévention. Surfrider Foundation appelle à muscler davantage cette proposition.

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Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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