The Chef Tomy démocratise la cuisine végane

Par Gaëlle Coudert , le 11 janvier 2024 — interview - 8 minutes de lecture

Thomas Loeffler, 27 ans, plus connu sous le nom de « The Chef Tomy » sur Tiktok et Instagram est l’un des ambassadeurs cette année du Veganuary, un défi d’un mois pour tester l’alimentation végane. Ce défi très prisé outre Atlantique est porté en France par l’association L214. The Chef Tomy, créateur de contenu et chef vegan originaire de Strasbourg, nous raconte comment son intérêt pour la cuisine végane est né et partage quelques conseils pour ceux et celles qui souhaiteraient tenter l’expérience !

Tu viens d’une famille de bouchers, qu’est-ce qui t’a poussé à devenir végan ?

J’ai commencé à m’intéresser à l’alimentation végétale lorsque j’étais en Colombie. J’étais parti faire un master en business international après mon école d’ingénieur, et j’ai ouvert mon premier business dans la pâtisserie. Je vendais des pâtisseries françaises. En décembre 2018, quand je suis rentré pour Noël, j’ai proposé à ma mère de tester avec moi l’alimentation végétale. Elle avait de gros problèmes de santé depuis plusieurs années, de l’arthrite psoriasique notamment et elle était sous cortisone depuis cinq ans. J’avais lu pas mal de choses et vu des documentaires sur l’alimentation végétale et je lui ai proposé qu’on teste juste pour voir ce que ça donne. C’est comme ça qu’on a commencé. Elle, au bout de 15 jours, ça lui a changé la vie, elle n’a plus jamais repris de cortisone, ça fait 5 ans maintenant. Et moi aussi je me suis rendu compte que je n’avais plus vraiment besoin de viande. Je suis passé végan directement. Les études que j’avais vu, c’était vraiment sur le végétalisme, sur le fait d’arrêter tous les produits d’origine animale, dont les produits laitiers qui ont aussi un mauvais impact sur la santé. 

Pour le topo sur ma famille, mon arrière-grand-père était boucher et certains de mes oncles le sont. Mais je viens surtout d’une famille de chasseurs, tout le monde chassait et moi aussi jusqu’à ce que j’ai environ 18 ans. J’étais baigné dedans depuis le plus jeune âge. À cet âge-là, on ne remet pas forcément les choses en question. Vers 16, 18 ans, j’ai commencé à réaliser que ce n’était plus du tout aligné avec ma vision des choses.

Ton intérêt pour la cuisine végétalienne a ensuite pris de l’ampleur ?

Je suis retourné en Colombie après ces 15 jours, et mon business de pâtisserie ne correspondait plus à mes convictions ; dans les éclairs par exemple, il y a beaucoup de lait. J’ai donc commencé à faire des pâtisseries végétales. J’ai réappris à tout faire, et ça s’est très bien passé car il y avait une grosse demande aussi là-bas pour ce type d’alimentation. En parallèle, je me suis formé à ce qui touche à la nutrition. Avant de rentrer fin 2020, j’ai commencé à écrire des e-books autour de l’alimentation végétale et en rentrant j’ai créé un site. J’ai ouvert un compte Instagram pour vendre mes e-books, pour me faire connaitre. 

Est-ce que tu t’attendais à un tel succès ?

Non pas du tout ! Mon idée à la base c’était de faire une quinzaine de vidéos (The Chef Tomy partage des recettes véganes sur ses réseaux sociaux – ndlr) et de m’arrêter là pour avoir quelques petits contenus sur Instagram. Sur Tiktok, ça a pris assez vite, donc j’ai continué. Même aujourd’hui je suis encore surpris. Le jour où je suis arrivé à 100 000 abonnés sur Instagram je me suis dit « c’est fou qu’en France 100 000 personnes soient intéressées par de la cuisine végane ! » Je ne pensais pas que cela pourrait être le cas de beaucoup plus de personnes, mais aujourd’hui on est à plus de 500 000 abonnés !

Qu’est ce qui t’a donné envie de devenir ambassadeur du Veganuary ?

Le fonctionnement du Veganuary pour moi c’est un fonctionnement juste. Le Veganuary ça permet aux gens d’essayer et de se rendre compte des choses par eux-mêmes. D’après les statistiques, beaucoup de gens réalisent que ce n’est pas si compliqué que ça. Finalement c’est aussi mon histoire à moi. J’aime bien ce format qui est plus encourageant, avec l’idée de partager les ressources, de donner les moyens de faire de nouvelles choses sans forcément culpabiliser.

Et toi, qu’est-ce qui t’a convaincu de continuer à être végan ?

De mon côté, tout se rejoint. Je suis très sensible à l’écologie, à la nature, au climat et à la cause animale. J’ai continué pour toutes ces raisons et pour la santé aussi. Je crois vraiment aux impacts bénéfiques de l’alimentation végétale sur la santé, pour l’avoir vu avec ma Maman et avec moi. Ce qui m’a motivé à continuer c’est juste que je me suis rendu compte que c’est le mode de vie qui correspond le mieux à mes valeurs, à ma façon de voir les choses et à mon éthique. Finalement, j’ai toujours mangé de la viande parce que j’ai grandi comme ça, et il arrive un moment où tu as le déclic. Je me posais de plus en plus de questions au niveau de l’éthique, au niveau de la planète, et ce qui a vraiment été le déclic c’est l’une des vidéos de L214 (qui dénoncent en général la violence subie par les animaux pour produire de la viande – ndlr). Elle m’a mis le coup de grâce, je me suis dit « là c’est bon j’arrête tout » ! 

Quels conseils donnerais-tu a quelqu’un qui souhaiterait devenir végan ?

Le premier conseil est de ne pas simplement retirer la viande de son assiette. Beaucoup de gens font ça et il ne leur reste que les légumes et les féculents. La société dans laquelle on vit fait que nos assiettes sont composées de façon à ce que la viande représente la majeure partie des protéines dans notre assiette. Si on la retire simplement, on va créer des carences. Donc un conseil tout simple c’est d’avoir des bons apports en protéines végétales et pour ça il fait se renseigner un petit peu sur la nutrition végétale, revoir un peu ses croyances et réapprendre à manger différemment. Les sources de protéines végétales que je recommande le plus c’est le tofu ou le tempeh (très intéressant car fermenté, donc il y a aussi tous les bénéfices de la fermentation). Les aliments à base de seitan sont très intéressants aussi, parce qu’ils ont une forte teneur en protéines, les protéines texturées (de pois ou de blé par exemple), les légumineuses, les oléagineux et les graines.

Un autre conseil que je donne beaucoup est de ne pas se jeter sur les produits transformés comme le steak végétal ou la saucisse végétale, parce qu’au final ce sont des produits véganes qui seront remplis d’additifs et de conservateurs qui ne seront pas du tout bons pour la santé.

Quels sont tes projets à venir ?

Normalement, il y aura un deuxième livre en 2024. Mon premier livre (Petits plats vegan – ndlr) est sorti en août 2023. L’objectif pour moi, au-delà des projets, est de sentir que j’ai un impact sur les gens. Ça peut être via des cours de cuisine ou des conférences par exemple. L’idée, c’est vraiment d’aider les gens à changer les croyances, et leur faire essayer cette cuisine. Mon objectif à plus long terme, c’est d’ouvrir une ou plusieurs associations. Ça pourrait être un refuge pour les animaux, ou une association sur l’éducation des enfants… C’est un projet plus lointain, que je mettrais en place vraiment quand j’aurais la possibilité de le faire. 

À lire aussi :

Pourquoi manger moins de viande est bon pour la planète ?

Deklic Kids : pourquoi certaines personnes ne mangent plus de viande ?

Gaëlle Coudert

Ancienne avocate parisienne reconvertie en journaliste basée dans les Pyrénées-Atlantiques, Gaëlle s’est spécialisée sur les sujets liés à l'écologie. Elle a cofondé le magazine basque Horizon(s), a été rédactrice en chef d'ID, l’Info Durable et rédige aujourd’hui des articles pour divers médias engagés dont Deklic. Ses passions : le sport (surf, yoga, randonnée) et la musique (guitariste et chanteuse du groupe Txango)

Voir les publications de l'auteur