Vœux 2024 des politiques en France : qui a eu un mot pour le climat et qui l’a zappé ?

Par Charlotte Combret , le 4 janvier 2024 - 9 minutes de lecture
Voeux aux Français.e.s, Crédit SIPA

Voeux aux Français.e.s, Crédit SIPA

En cette fin d’année 2023, de nombreuses personnalités politiques ont adressé leurs vœux aux Français, à commencer par le chef de l’État. Des discours de quelques minutes partagés en vidéo dans lesquels le climat – et l’écologie de manière générale – a encore du mal à se frayer un chemin audible. Vive la république, vive la France ?

Celui qui parle du climat, mais qui en fait trop

« Qui aurait pu prédire la crise climatique ? » se demandait-il l’année passée alors qu’il présentait ses vœux aux citoyens français. Celui qui parle du climat, mais qui en fait trop, c’est lui : Emmanuel Macron. Après s’être attiré les foudres des scientifiques qui alertent sur les conséquences du dérèglement du climat depuis des décennies, pour son septième discours du 31 décembre, le président de la République semble vouloir rassurer. « Nous avons continué à créer des emplois tout en réduisant encore plus rapidement nos émissions de gaz à effet de serre et ce, conformément à nos engagements » se félicite-t-il. Un satisfecit affirmé qui cache une réalité plus nuancée. D’après le baromètre du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa), les émissions de gaz à effet de serre ont bien diminué de 4,6% sur les neuf premiers mois de 2023 par rapport à 2022. Cependant, les premières conclusions révèlent que cette baisse résulterait principalement de facteurs conjoncturels en lien notamment avec la crise de l’énergie, plutôt que de la politique énergétique du gouvernement. 

Qu’à cela ne tienne, pour le chef de l’État, la politique écologique de la France prend valeur d’exemple. « Nous serons déterminés à agir pour qu’en 2024, notre écologie à la française, notre planification continue de se déployer comme un modèle, et un chemin singulier qui nous permettront de sortir des énergies fossiles et de gagner en indépendance et en progrès » assure-t-il, avant d’ajouter que « 2024, année de la détermination, de l’efficacité, des résultats ». Une prise de parole qui est loin d’avoir convaincu les défenseurs de l’environnement. « Je n’ai pas retiré du discours l’impression qu’il ait une vision structurée de l’environnement » réagit Jean-Marc Jancovici au micro de BFM. « Les vœux d’un Président qui s’écoute mais n’écoute pas les français·es », fustige Sandrine Rousseau sur X.

Ceux qui zappent complètement le climat dans leurs vœux

Du côté des vœux prononcés par les responsables politiques d’extrême-droite, niveau climat, c’est silence radio. Pas un mot ne lui est consacré. « Dans le débat public, jamais nos idées n’ont été autant validées » se réjouit plutôt la présidente du groupe du Rassemblement national (RN) à l’Assemblée Marine Le Pen, accoudée sur son grand bureau. Dans son viseur, à défaut de l’environnement : les élections européennes de juin prochain. « Nous continuerons de porter la voix de cette France du travail, de l’effort, du mérite » déclare de son côté le président en titre du parti Jordan Bardella devant un drapeau tricolore, avant d’évoquer à son tour le prochain rendez-vous électoral. 

Cette « valeur travail » se glisse aussi dans le discours de Sylvain Maillard, le chef de file des députés Renaissance. L’écologie, en revanche, sonne toujours aux abonnés absents, le chef des élus macronistes préférant donner le la à ce qui lui semble être le principal « défi » de la France pour 2024 : la réussite des Jeux Olympiques et Paralympiques organisés sur son sol. 

Ceux qui citent le climat dans leurs vœux

C’est devant le port de Nice, sa ville, que le président des Républicains (LR) Eric Ciotti s’adresse à ses concitoyens. Dans son discours : l’évocation de « l’immigration », « la sécurité » et « l’économie », puis un mot sur le climat, rapidement glissé. « Nous voulons aussi être au cœur des grands défis de l’avenir pour notre jeunesse, pour l’éducation, pour la recherche, pour l’université, pour porter un message puissant face au défi climatique » affirme-t-il. Même posture pour Valérie Pécresse. Dans un ton grave, la présidente de la région Île-de-France abonde : la France a « besoin de règles et de rêves ». Elle se congratule d’y avoir répondu, en ayant notamment « engagé une révolution des transports », « lancé le plus vaste plan de rénovation de nos lycées franciliens » et « enclenché une profonde mutation écologique pour construire un futur désirable ». 

Changement de décor avec Fabien Roussel. « 2023, c’est l’année de la surchauffe, l’année dont on se serait bien passé » partage sur fond rouge le Secrétaire national du Parti communiste français (PCF). C’est peu de le dire, 2023 est l’année la plus chaude jamais enregistrée sur Terre, d’après l’observatoire européen Copernicus. Principaux responsables de cet embrasement selon lui : « la guerre », « la vie chère », « la réforme des retraites » ou encore « la loi immigration », mais aussi « le réchauffement climatique ». Tandis qu’il partage ses vœux, le Premier secrétaire du Parti Socialiste Olivier Faure se saisit d’un stylo pour dessiner une colombe, tenant dans son bec un drapeau européen. Si de son côté « la crise climatique », avec « une COP28 très décevante » et « des réponses qui viennent trop tard et qui sont trop faibles » peuvent être des moteurs de « découragement », il préfère rappeler que : « Quand l’espoir rencontre la volonté, nous changeons le monde ». 

Ceux qui placent le climat au centre de leur vœux 

Espoir, c’est la teinte que donne à son discours Marine Tondelier, Secrétaire nationale d’Europe Ecologie les Verts. En toute logique, les questions environnementales figurent au premier plan de sa vidéo de vœux 2024. « Face aux injustices sociales, face à l’inaction climatique – dont aussi celle de la France, quoi qu’en dise notre Président, face à des politiques nationales qui ne sont pas à la hauteur ni en matière de biodiversité, ni en matière de sobriété et de déploiement des énergies renouvelables, ni en matière de santé environnementale, les choses sont très simples, vous savez quoi, on ne se résignera pas » assure-t-elle. 

Le « climat », c’est aussi l’une des deux « boussoles » qui a guidé le message de vœux d’Anne Hidalgo, aux côtés de la « solidarité ». La maire de Paris en a profité pour dresser un bilan des mesures déployées par ses soins. « Nous avons accéléré nos actions contre le dérèglement climatique et continué à transformer Paris pour que nos enfants puissent y vivre en bonne santé. Nous avons continué à planter toujours plus d’arbres, à agrandir les jardins publics, à retirer le béton dans les cours d’écoles » rappelle-t-elle. « Nous avons multiplié les pistes cyclables et réduit encore la place de la voiture car c’est simple : moins de voitures, c’est moins de pollution et moins de pollution, c’est moins de morts chaque année » explique-t-elle encore aux Parisiens. Mais la fin de son laïus consacrée aux JOP frise le greenwashing et pourrait presque renvoyer Anne Hidalgo dans la toute première catégorie. « Ces Jeux de Paris nous permettent aussi d’accélérer notre action pour mieux adapter Paris aux changements climatiques et faire vivre la solidarité » avance-t-elle. Les polémiques sociales (sans-papiers sur les chantiers, transfert des sans-abris, logements étudiants réquisitionnés…) et environnementales (tour du jury de l’épreuve de surf à Tahiti…) actuellement à l’œuvre montrent un visage moins rose, et moins vert, de l’événement. 

Celle qui parle du climat et de la vie dans ses vœux intranquilles 

Un cru 2024 bien en deçà de l’urgence pour la plupart des défenseurs du vivant. Si peu de responsables politiques ont brillé dans l’exercice cette année encore, il est réussi avec brio par la militante pour le climat Camille Étienne, devenue Présidente d’un jour, présidente d’un discours, délivré le 31 décembre 2023 sur Mediapart. « Ça m’aurait plu (…) d’avoir un président capable d’assumer sa vulnérabilité, comme un humain » commence-t-elle. Libérée d’un costume « trop grand », mais aussi des stratégies politiques qui y sont accolées, elle livre avec éloquence des vœux présidentiels intranquilles, entre lucidité et espérance.

« Nous ne sommes pas victimes du coup du sort ou de notre incurie. Le dérèglement climatique et l’effondrement de la vie sur Terre sont d’origine humaine. En sortir aussi. » La crise est là, les solutions également. Aussi nous revient-il en partie de faire de cette « immense aventure », une « épopée » ou un « naufrage », rappelle-t-elle, considérant la « joie » comme acte de « résistance ». « Je vous souhaite donc pour les années à venir d’oser étonner la catastrophe. Nous pourrions être surpris. Et si l’on échoue, l’année suivante se souviendra que nous avons fait ce qui était juste. Et puis si ça passe pas… 49.3. » Si vœux il y a avait à faire, il serait sûrement bon que les siens se réalisent. « Chers concitoyens, chères concitoyennes, vive la république, vive la France. »

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Charlotte Combret

Issue d’une grande école de commerce, Charlotte délaisse rapidement les open spaces parisiens pour s’engager dans la voie de l’indépendance. Son désir de lier pédagogie et poésie la conduit à devenir journaliste rédactrice, dans les Landes, pour des entreprises et médias engagés. Ses passions : le cinéma animalier, les voyages en train, les lectures féministes et les jeux de mots en tout genre.

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