Volte-face : Mélanie et Olivier Marx : « Nous en avions assez du rythme urbain »

Par Philippe Lesaffre , le 26 avril 2024 - 6 minutes de lecture
Mélanie et Olivier Marx

Mélanie et Olivier Marx

En 2020, Mélanie et Olivier Marx se sont installés en Auvergne, au plus près du parc naturel régional Livradois-Forez. Nichés dans une commune rurale, ils accueillent dorénavant des entreprises en quête de séminaires en pleine nature. « On nous aurait dit il y a cinq ans qu’on monterait un tel projet en couple, on ne l’aurait pas cru », glisse Olivier.

L’entretien devait se dérouler à deux. Or, au moment de démarrer l’échange, Olivier Marx propose d’intégrer son épouse Mélanie à la conversation. « Nous avons changé de vie ensemble », justifie sourire en coin l’entrepreneur, tout juste quinquagénaire. Installé depuis deux ans dans le Puy-de-Dôme, au cœur du parc naturel régional Livradois-Forez, le couple a quitté en 2020 la région du Rhône pour s’installer en Auvergne, à Saint-Bonnet-le-Chastel. « Nous en avions assez du rythme urbain », glisse l’ex-Lyonnaise. Alors ils ont emménagé dans une maison en pierres. Et au cœur de leur terrain de quatre hectares, Mélanie et Olivier ont fait rénover « pendant  un an et demi » une ancienne grange de moulin, une ferme qui datait du 19e siècle. 

But de l’opération : y organiser, loin de l’agitation des grandes villes, loin du bitume, des séminaires d’entreprises, entre autres. « Il y a cinq ans, sourit Olivier, on nous aurait dit qu’on monterait un tel projet en couple, on ne l’aurait pas cru. » Depuis, ils en ont fait, du chemin, et en un peu plus d’un an, les deux fondateurs de « La Tête au vert », du nom de leur structure, ont accueilli une quinzaine de groupes, qui sont « nourris, logés, coachés », dit-il. 

Aider les entreprises à bifurquer

« C’est un huis clos, ajoute Mélanie. L’objectif, c’est que les personnes arrivent avec une problématique et repartent avec une résolution. » Selon Olivier, « cela peut aller très vite ». Lui et sa femme essayent de « les mettre à l’aise » afin que ce soit efficace. Ensemble, à mille lieues des routines ou des habitudes du quotidien, mais au rythme d’une cadence soutenue, atelier après atelier, discussion après discussion, « les équipes parviennent à mieux se concentrer et ainsi à répondre à leurs enjeux », glisse Olivier, qui a fondé (puis vendu) plusieurs entreprises au cours de sa carrière. Lui reste tout le temps à leurs côtés pour les aider à « avancer ». 

Les motivations varient. Certains groupes frappent à leur porte, car ils désirent par exemple « repenser leur stratégie », dixit Mélanie. D’autres comptent limiter l’impact écologique de leur organisation. « La plupart des entreprises, en France, n’ont pas encore bifurqué, la connaissance des enjeux reste encore assez limitée, observe Olivier. Beaucoup trient leurs déchets, mais les trajets aériens ou en SUV n’ont pas cessé. Nous voulons les aider à trouver le moyen de pivoter, si c’est ce qu’elles souhaitent. » 

« Ralentir et se poser les bonnes questions »

Fils de professeurs, il raconte avoir toujours aimé l’enseignement. « Le consulting, c’est dans mes gènes », ajoute celui qui constate, avec plaisir, que de plus en plus de citoyens, au sein des entreprises et ailleurs, cherchent à « ralentir » et à se poser « les bonnes questions ». D’après lui, « cela progresse depuis la pandémie »… Olivier en veut pour preuve toutes ces structures qui tentent de faire évoluer leur modèle d’affaire, certains ont rejoint le mouvement des entreprises pour le climat. Initiative qui a émergé à la suite de la médiatisée convention citoyenne pour le climat, qui a offert l’opportunité à de nombreux acteurs économiques, de tous les secteurs, de se rendre compte de l’état de la planète et des effets du changement climatique. 

Une prise de conscience qu’ils ont aussi vécue il y a plusieurs années. « Je me souviens encore d’un déjeuner à l’occasion duquel, pour la première fois, ou presque, j’ai entendu parler du terme de permafrost. C’était il y a plusieurs années, ça m’a marqué », dit-il. Ainsi, Olivier a commencé à se renseigner plus en détail sur les questions environnementales. Et à tenter de mieux cerner le rôle (important) des organisations en ce qui concerne l’adaptation au changement climatique. Mais pas facile de se métamorphoser et de changer de voie en un claquement de doigts, il le sait bien. « Certains aimeraient, observe Olivier, mais ils ne peuvent pas… »

Démission, et puis le grand saut

Retour en arrière : en 2020, le couple décide de se mettre au vert, visite l’Auvergne. « J’avais déjà vécu dans le Puy-de-Dôme, à La Bourboule, je connaissais un peu, pas Olivier », explique-t-elle. En quête d’un « logement ancien », ils en visitent un certain nombre dans le coin, et puis ils tombent amoureux de leur futur territoire, au sud de la Haute-Loire. Ils choisissent alors de s’implanter, en famille, dans cette zone rurale, située à une heure de route de Clermont-Ferrand, à 25 minutes de la commune d’Ambert. 

Pas de souci pour Olivier, il était à « 100 % en télétravail » au sein d’un cabinet de recrutement qu’il a lancé en 2017 – et qu’il n’a pas abandonné pour l’heure. Pour se consacrer à sa nouvelle mission à plein temps, Mélanie, de son côté, a « démissionné » en décembre 2020 de son poste d’alors. À Lyon, elle a dirigé jusqu’à neuf établissements médico-sociaux au sein de la Fondation Ove, qui accompagne en particulier les personnes en situation de handicap, des enfants, des jeunes adultes, pour la plupart. 

Le grand saut. « De façon générale, nous ne regrettons absolument pas notre décision, affirme Olivier, nous avons été très bien accueillis à Saint-Bonnet-le-Chastel. » Ce qui leur a plu, notamment : l’entraide sur le territoire, répondent-ils, presque en cœur. « L’autre jour, typiquement, nous avions besoin d’une scie circulaire, se souvient-il. Il a suffi de faire un tour au village d’à côté pour trouver en un temps record quelqu’un qui pouvait nous en prêter une. Cela marche, il faut juste demander ! » 

Aujourd’hui, dans leur antre, ils accueillent, outre les entreprises en séminaires, des particuliers dans des tiny houses, de petits logements de 18 m² localisés en bordure de forêts de sapins et de pins. Comme le précise Mélanie, ce sont des personnes qui cherchent à « se reconnecter à la nature ». Eux deux y sont parvenus, alors s’ils peuvent montrer le chemin…

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Philippe Lesaffre

Journaliste depuis une dizaine d'années, Philippe couvre l'actualité de l'écologie pour plusieurs médias comme Deklic, mais aussi Marcelle, Ekopo... Il est aussi le cofondateur du média indépendant Le Zéphyr, dédié à la protection de la nature et du vivant. Des sujets qui le passionnent.

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